Cérémonie de Mariage Enimia-Aectelion Mepeim

Le palais du Mont Quel’tan était juché sur les hauteurs d’Elderine aux flancs d’une chaîne de montagnes en ces jours là encore considérées comme présentant les plus splendides paysages de la Kandrasie ; longtemps il avait été le reflet des troubles dans le territoire et de la faiblesse de ces dirigeants ; aussi quelques langues fourchues n’hésitaient pas à le qualifier de palais aux sombres visages construit sur les ruines des intendants ayant failli à leur tâche. La plus ancienne structure encore visible datait de l’intendant Sévérian : différentes ailes assemblées en U surplombant la cité blanche et les jardins si réputés de part Retrahant.

Au centre de l’édifice s’élevait une large tour haute de trois étages et pointant son sommet vers le ciel à la manière d’une main tentant d’atteindre le soleil. Son nom tirait son origine de cette structure bien particulière dessinée paraît-il par l’intendant Aectelion Premier en personne. La Tour de Kara s’ouvrait à l’extérieur par de lourdes portes constamment écartées pour laisser le passage aux nombreuses allées et venues des familiers et diplomates reconnus de Retrahant. Ces derniers passaient tout d’abord par un étage occupé exclusivement d’écuries royales, fauconneries et chenils contenant l’animalerie de l’intendance, joyau des différentes races et espèces de la noblesse retrane.
Accéder au premier étage nécessitait le passage par l’escalier des Rois, façonné dans l’ademine la plus pure de la chaîne de Mara et transporté en une seule pièce par les artisans de la cité blanche. L’épisode avait notamment élevé l’architecte chargé des travaux au rang de semi-dieu par la population locale éblouie par le prodige qui avait tout de même nécessité trois années de dure labeur. Cet escalier s’ouvrait au premier niveau sur les quartiers de la garde pourpre, célèbre armée personnelle de la famille régente chargée notamment de la protection des différents corps diplomatiques. Les taureaux et éperviers disposaient d’une salle d’entraînement, d’une armurerie et bien évidemment de dortoirs permettant le sommeil simultané de près de 300 guerriers.
Les deux derniers étages réservés à un usage strictement diplomatique étaient fortement fortifiés et protégés par différents corps d’armées hétéroclites d’origines divers et totalement neutres. On accédait au deuxième niveau de la tour aux différentes chambres luxueuses mises à disposition des diplomates et messagers étrangers tandis que le dernier étage se révélait d’une certaine originalité, formé d’un hexagone parfait, chaque côté représentant un territoire de Retrahant.

Ce dernier étage bénéficiait des derniers progrès architecturaux ; il se définissait par un alignement sur les côtés de divers pièces laissées libres de décoration aux territoires concernés qui les utilisaient généralement pour entreposer les parchemins, encriers de réserve ou simplement pour se concerter en privé d’un sujet débattu devant l’assemblée. Ces pièces s’ouvraient ensuite sur une grande salle couverte d’un ensemble de toiles par temps de froid ou de pluie et ouverte à la fraîcheur du soleil en été : la salle de Serul.

En ce printemps 340 de l’ère II, l’intendant Aectelion Premier d’Istria Arkspel avait convié les représentants de l’ensemble de Retrahant. Comme à l’habitude en pareil cas, le palais du Mont Quel’Tan fourmillait d’escortes heureuses et admiratives des lieux, de diplomates pressés ou encore de messagers en quête de pourboires. Le vieux régent se tenait debout dans la tribune de Kandrasie et faisait face aux nombreux nobles à avoir répondu à son appel en dévisageant les différentes statues, gargouilles, tapisseries ou encore gravures qui ornementaient la salle de Serul. Il attendit que le silence se fasse parmi l’assistance et prit la parole du ton las qu’on lui connaissait au crépuscule de sa vie :

« Nobles seigneurs de Retrahant ; je vous ai conviés en ce jour ensoleillé pour vous faire part d’un événement exceptionnel qui va prochainement se dérouler à Elderine, la cité blanche de Kandrasie. Nos artisans préparent ces festivités dans le plus grand secret depuis de nombreuses semaines et j’ai le bonheur de vous annoncer que l’héritier de la régence, le prince Servant Aectelion Mepeim d’Istria Arkspel fils de la princesse Jehana d’Istria Arkspel et de feu l’amiral de la troisième flotte beilanaise Mafet Mepeim épousera dans un an jour pour jour à Elderine la baronne Enimia Sidh de l’Îlot de la Perfidie (delta beilanais). Les familles prestigieuses de Retrahant y sont cordialement invitées et je vous charge de prévenir vos compatriotes de cet événement. »

Il se tourna alors vers son neveu qui se trémoussait sur son siège, gêné des nombreux regards se tournant vers lui et s’assit à ses côtés attendant les réactions des participants.

Le futur marié s’avança alors aux vues de tous, kandrasiens et étrangers qui se trouvaient réunis pour célébrer les noces les plus assistées depuis les jours sombres. Il se tenait debout sur le devant de la tribune à la sortie de la cité des rois tandis que différentes processions débouchaient dans une ribambelle de couleurs et de musiques des routes et chemins menant au reste du monde. Il épousseta légèrement la tenue rouge pourpre qu’il portait et prit la parole d’une voix forte :

« Dames, messires de Kandrasie et de Retrahant ; j’ai la joie de vous accueillir à Elderine, la cité blanche pour célébrer mon union avec dame Enima Baronne du Delta. »

Il se tourna vers les ambassadeurs Elderan Kar et Brumacier qui se tenaient assis dans la tribune :

« De nombreux peuples ont répondu à mon invitation et brillent par la prestance de leurs représentants ; je tiens à remercier tout particulièrement la Gramée et le Beilan du dialogue qu’ils ont choisi de créer et de maintenir avec mon peuple ; nous sommes heureux d’avoir pu accueillir leurs ambassadeurs qui se sont montrés dignes de leur fonction et, par delà celle-ci, je tiens à gratifier de mon estime les hommes eux-mêmes qui ont su faire preuve de qualités humaines admirables au cours de leurs rencontres avec les fils de Kara et Erelian.

Roy Drehëran de SombreSource, nous n’avons pas eu jusqu’ici l’occasion de nous rencontrer et je tiens à vous remercier de bénir cette union. Marquise Aliènor du Piedmont, Baron Elderan Kar des Glacées, ambassadeur du Royaume de l'Elbre, vous êtes les bienvenus à la cité blanche. Le Seigneur Ulthar de Mornemares reçoit aussi mes plus sincères salutations ainsi que celles d’Enimia ; nous regrettons qu’il ait été retenu au Beilan.

Grande prêtresse et intendante Doubiah Feld Magrath, nous vous remercions de vous être déplacée, la longue chevauchée vous ayant menée jusqu’ici a dû vous fatiguer et nous remercions votre peuple de sacrifier un peu du temps de sa grande prêtresse pour assister à cette cérémonie. Ethan Brumacier, ambassadeur de Gramée, Grand Khan Veracle et seigneur Elder de Vélidian ; j’ose espérer que votre séjour parmis nous sera à la hauteur de l’honneur que vous nous faites en nous offrant votre présence.

Grand Tiram Taclec Rem'Ia ; le peuple des déserts a souvent montré aux kandrasiens la leçon de son courage, de sa fierté mais aussi de sa modestie. Nous sommes heureux de pouvoir enfin accueillir en ces murs celui qui a tant réalisé pour son peuple.

Archevêque Arshan d’Itoria ; nos divergences de foi, de croyances et de valeurs ne peuvent que souligner la hauteur du cadeau que vous nous faîtes en représentant ici le peuple du Ciran. Votre réputation vous a précédé et il tarde au patriarche de mon oncle l’intendant de s’entretenir avec vous de Gaëd et de notre panthéon.

Commandeur Azhgaran de Börm ; votre peuple est l’un des plus enfermés sur son territoire et nous respectons le trésor le plus inestimable que vous protégez au sein de vos villes et de vos villages : la tranquillité. Je suis troublé d’être cause de votre voyage si loin de la quiétude de vos terres et mes plus sincères remerciements ne seraient que trop peu pour atténuer l’honneur que vous nous faites.

Enimia s’avança à son tour pour prendre la parole avec à ses cotés le Baron Elderan Kar. Le contraste était saisissant entre cette jeune Baronne, élégamment vêtue et le Seigneur de Tourage que le peuple kandrasien connaissait. Elle regarda le prince servant Aectelion avec lequel elle n’avait pas eu l’occasion de parler depuis son arrivée. Elle haïssait ces protocoles qui l’éloignaient de celui qu’elle aimait. Elle aurait voulu être seule avec lui et ne pouvait détourner son regard. Svold kastriss, également présent lui glissa à l’oreille « Sidh, Patresis, ton frère, aurait su trouver les mots ». Les paroles atteignirent leur objectif.

Je vous remercie d’être présent à mon mariage. Aectelion a su rendre hommage aux Grands de Retrahant qui sont présents à Elderine. Je suis heureuse que mon peuple, les Perfidiens et les représentants des Seigneuries du Delta soient également venus. Je tiens à saluer plus particulièrement la présence du Souverain du Royaume de l’Elbre.

Svold kastriss enchaîna :

Les festivités vont se diviser en plusieurs phases. Nous aurons, tout d’abord, une cérémonie religieuse selon le culte kandrasien. Ensuite, ce mariage sera célébrée selon la religion gaëdienne dans la chapelle de l’ambassade beilannaise. Etant donné la taille de cette chapelle, la participation sera réduite mais vous trouverez à vous distraire par ailleurs. Enfin, elles se termineront par un banquet au cours duquel les participants pourront remettre les présents aux nouveaux époux et venir s’entretenir avec eux.

En attendant, nous vous laissons profiter de cette cérémonie d’ouverture et attendons l'arrivée des Grands de ce monde...

Enimia nota l’arrivée de la délégation graméenne et décida d’aller les saluer. Son futur époux semblait occuper avec des membres de sa famille à régler certains détails de la cérémonie. Elle espèra qu'il la rejoindrait.
Elle reconnut le Grand Khan à ses emblèmes et se dirigea vers lui en premier.

Soyez le bienvenue, Grand Khan Veracle. Habituellement, les Seigneurs du Royaume de l’Elbre ne sont pas ravis de voir un Khan car, en général, il est devant leur porte à la tête d’une armée composée de dangereux guerriers animés par des intentions belliqueuses. Mais, dans mon cas, je suis très heureuse que vous vous soyez déplacé pacifiquement à Elderine pour célébrer mon mariage. D’après les rumeurs, votre confrérie commence à retrouver sa puissance d’avant l’épidémie, six Seigneurs l’auraient rejoint, vous devez en être fier.

Elle vit aux cotés du Grand Khan celui qu’elle pensa être l’ambassadeur, d’après les descriptions qu’on lui en avait faite.

Seigneur Ethan Brumacier, je vous salue. Votre réputation vous a précédé. Beaucoup de Seigneur vous considère comme un talentueux ambassadeur. Vous êtes également membre de la confrérie khan, si je ne me trompe.

Elle reconnut la jeune femme à la chevelure noire de jais et aux yeux bleus. Elle la regarda longuement sans rien dire et s’approcha d’elle.

Vous êtes ravissante Doubiah Feld Magrath. Je suis émue… euh honorée de vous rencontrer.

Doubiah Feld Magrath, Elder de Vélidian et Veracle Khan étaient entrés dans la salle de réception qui se remplissait petit à petit. On y apercevait pêle-mêle des beilanais, des fironkois, des ciranais et quelques orcumiens. Cependant, Doubiah ne prêtaient guère attention à cette débauche de couleurs provenant d'étoffes chamarrées, toutes plus chères les une que les autres. Il faut dire que si le Grand Khan et le Seigneur Vélidian avaient fait quelques efforts vestimentaires, elle ne portait que sa robe noire de prêrtresse d'Amk Cherk. Certes, elle détonnait dans cette atmosphère, mais le noir faisait ressortir la blancheur de son teint et la profondeur de son regard.
Doubiah semblait être ailleurs. Loin de tout le brouhaha qui commençait à enfler. Son regard se posait de ci delà dans la salle, comme si elle était à la recherche de quelqu'un. Enfin, elle le repèra. Il était en grande discussion avec des seigneurs beilannais et fironkois. Lorsqu'il la vit, lui aussi, il s'excusa poliment auprès de ses interlocuteurs et vint s'agenouiller devant son intendante.

"Salut à vous, ô Grande Prêtresse, fille de l'Unique."
"Salut à toi, Ethan Khan ! Relèves toi, veux-tu ! -lui chuchotant à l'oreille alors qu'il se relevait : tu m'as manqué, mon ami". Elle en profita pour glisser furtivement un papier dans la main du jeune ambassadeur.
"Alors, quelles sont les nouvelles de notre ambassadeur ?"
"Bonnes, je l'espère, Grande Prêtresse. Comme vous l'avez sans doute remarqué, j'étais en conversation avec les beilannais et les fironkois. Et je compte m'entretenir en privé avec le Grand Tiram d'Orcum qui, m'as-t-on dit, ne devrait pas tarder d'arriver."
"Tu as fait un très bon travail, Ethan Khan. Je t'en remercie et la Gramée toute entière t'en est reconnaissante."

Tandis qu'Ethan Brumacier et Doubiah conversaient, une dame, certainement de très haute noblesse s'approcha d'eux. Bien qu'elle ne l'ait jamais vue avant, Doubiah sut immédiatement qu'elle se trouvait en présence de la baronne Enimia Sidh.

"Vous êtes ravissante Doubiah Feld Magrath. Je suis émue… euh honorée de vous rencontrer."
"Je suis également honorée de vous rencontrer, baronne. J'espère que nous trouverons le temps de nous entretenir longuement."

Le jeune fiancé Aectelion Mepeim s'approcha de son oncle le régent, en grande conversation avec l'ambassadeur Elderan Kar du Beilan : il lui signifia quelques mots à l'oreille, lui indiquant l'arrivée de la délégation orcumienne aux portes de la cité. Après avoir échangé quelques mots avec le Baron de tourages qu'il fréquentait depuis de nombreux mois en compagnie de son oncle, il s'excusa poliment et s'éloigna de quelques pas regardant autour de lui avec une certaine fébrilité. Enfin il l'aperçut et un franc sourire s'afficha sur son visage, remplaçant la légère inquiétude qui l'avait prise un temps.

Elle était élégamment vêtue d'une longue robe épousant ses formes et une fine ceinture en soie bleue, fermée d'une broche représentant un ankh enlacé autour d'un dragon se fondait agréablement avec la sobriété des bijoux, discrets et réalisant avec une intense perfection leur principale mission : mettre en avant la beauté de leur maîtresse.

Son champ de vision s'élargit soudain à la Grande prêtresse avec qui elle semblait en grande conversation ; il ralentit le pas, permettant à ces dernières de poursuivre leur discussion avec un maximum de discrétion et, arrivant à proximité de sa fiancé, n'y tint plus et lui frôla légèrement l'avant-bras dénudé, lui indiquant ainsi sa présence. il lui adressa un large sourire, riant avec ses yeux du trouble de sa compagne. Il se tourna alors vers la Grande Prêtresse, inclinant légèrement la tête devant la beauté de l'intendante de Gramée : elle ne valait évidemment pas celle d'Enimia qui allait à cette perfection une touche de douceur et de pureté mais il comprenait que certains hommes ne parviennent pas à masquer leur trouble en sa présence.

"Je suis enchanté de faire enfin votre connaissance, dame Doubiah Feld Magrath, votre présence nous a agréablement surpris et nous sommes heureux de vous voir à cette cérémonie. Comptez vous rester quelques temps parmi nous ? Je suis certain que notre cité vous plaira et que ses agréments sauront vous convaincre de prolonger votre séjour."

Enimia regardait Doubiah dans les yeux comme si elle cherchait à pénétrer son esprit. Elle se rendit compte que son silence et son regard insistant devaient être pesant. Elle détourna son regard et posa sa main sur le bras de Doubiah avant de lui répondre. Ce qu’elle ne pouvait plus voir dans le regard, elle le ressentirait peut-être par le contact physique.

"J’y compte bien. Il est vrai que le moment n’est pas forcément le plus adéquat. Je risque d’être très prise, j’imagine que vous comprenez pourquoi. Mais, je suis persuadée que nos chemins ne seront jamais éloignés l’un de l’autre. Une intuition…"

Svold Kastriss se tenait un peu à l’écart et son visage était rembruni comme s’il n’appréciait pas qu’Enimia converse avec les graméens.

"Laissez-moi vous présenter Messire Svold Kastriss."

Svold Kastriss s’agenouilla devant l’intendante graméenne.

"Grande Prêtresse Intendante de Gramée, mes respects."

Enimia, voyant Svold faire sa révérence pensa qu’elle aurait dû faire de même devant la Grande Prêtresse de Gramée. Mais, étrangement, quelque chose l’avait poussé à adopter une attitude familière.

"Vous avez déjà rencontré un de mes vassaux, il me semble. Il m’est apparu qu’il a été troublé par cette rencontre.
Mais, Svold Kastriss est plus représentatif de mon peuple, les Perfidiens. L’îlot de la Perfidie regroupe deux grandes familles les Sidhs et les Kastriss qui ont tout pouvoir, cependant les Kastriss sont au service de ma famille et me sont donc entièrement dévoués, n’est-ce pas Svold ?"

Svold Kastriss acquiesça, il n’était pas habitué qu’Enimia lui parle en utilisant son prénom, la tradition perfidienne faisait que l’on s’appelait par son nom de famille. Enimia reprit :

"J’aurais voulu vous présenter mon ami, le Baron Elderan Kar, l’ambassadeur du Royaume de l’Elbre, il était à mes cotés, mais a disparu dans la foule. J’espère qu’il va venir nous rejoindre. J’attends impatiemment l’arrivée de mon Roy également. Quant à mon futur mari, j’espère qu’il réussira à se libérer de sa famille et de ses obligations. La situation est plus aisée pour moi, je ne m’occupe guère de l’organisation des festivités."

C’est à ce momment, qu’elle ressentit une caresse sur son bras. Elle sut aussitôt, avant de le voir, que le Prince Sevant Aectelion l’avait rejoint. Elle frissonna, le regarda tendrement dans les yeux et lui prit sa main entre les siennes. Elle aurait aimé l’embrasser et surtout se réfugier dans ses bras, mais la bienséance ne le permettait pas.

"Mais, dites-moi, Grande Prêtresse, j’ai reconnu le Grand Khan et l’ambassadeur de Gramée, dont vous semblez être proche. Présentez-les à mon Prince ainsi que les autres seigneurs qui vous ont accompagnés."

Ethan parlait avec un petit groupe d'invité. Peu avant il avait pris la résolution de s'entretenir avec l'ambassadeur Elderan Kar. Il allait le faire lorsque ses yeux s'arrêtèrent sur un petit groupe. Quelle surprise, Doubiah se tenait là. N'y tenant plus, il s'excusa et s'approcha d'elle :

_ Salut à vous, ô Grande Prêtresse, fille de l'Unique.
_ Salut à toi, Ethan Khan ! Relèves toi, veux-tu ! - lui chuchotant à l'oreille alors qu'il se relevait : tu m'as manqué, mon ami".

Ethan était aux anges. De plus il avait reçu un mot d'elle. Les mots s'entremélaient, rien d'autre ne comptait que Doubiah.

_ Seigneur Ethan Brumacier, je vous salue. Votre réputation vous a précédé. Beaucoup de Seigneur vous considère comme un talentueux ambassadeur. Vous êtes également membre de la confrérie khan, si je ne me trompe.

Il s'agissait de la Baronne Enimia Sidh. Elle était resplendissante. Ethan dû sortir de sa rêverie pour se joindre à la conversation.

_ Dame Enimia Sidh, vous me flattez. Ethan s'inclina. "Vous avez effectivement raison je suis un Khan.
Je cherchais votre ambassadeur afin de discuter un peu des futurs relations que le Beilan et la Gramée pourrait avoir ...

En apercevant son futur époux se joindre à eux, Ethan ajouta, souriant :

_ ... mais ne vous inquiêtez pas, je ne vous embêterez pas avec ce genre de propos aujourd'hui. Toutes mes félicitations et mes voeux de bonheur pour votre mariage.

Ethan s'inclina devant Enimia Sidh et son futur mari Aectelion Mepeim qu'il salua.

Elder de Vélidian n'avait jamais observé une telle richesse, ni une telle diversité de peuples réunis en un seul et même endroit. Tout ce que l'on pouvait compter de nobles éminents et de personnalités incontournables, les Grands de ce monde comme l'avait précisé Enimia Sidh, s'était donné rendez-vous à cette cérémonie. Il était impressionant de voir ces étrangers de grande importance se cotoyer comme s'ils partagaient des liens forts et profonds, parfaitement insoupconnés du seigneur Graméen, toutefois, la perspective d'être mis à l'écart était encore plus intimidante.

Elder de Vélidian fut particulièrement gêné lorsque Enimia vint saluer sa délégation sans lui adresser un mot. Cependant, cela n'était pas tout à fait pour l'étonner. Contrairement à la Grande Prêtresse, à son beau frère d'Ambassadeur et au Grand Khan, il ne possédait ni titre, ni distinction propre. Il n'avait que son domaine et son nom qui, s'il avait été retenu par le Prince servant lors de son discours de bienvenue, était en fin de compte parfaitement inconnu pour ces étrangers. Lorsque la conversation s'engagea entre la Baronne et la Grande Prêtresse, le seigneur de Vélidian décida de faire quelques pas, autant pour feindre l'occupation que pour écouter discrètement les propos échangés par les deux femmes.

Il ne saisit que peu de chose de cette conversation. Dame Enimia Sidh parlait d'Ilot de Perfidie et de Royaume de l'Elbre, deux lieux parfaitement inconnus du graméen qui, s'il en croyait l'origine de la Baronne, devaient se situer au Beilan. Elder songea qu'il devrait un jour perfectionner sa connaissance du monde et éviter ainsi de passer pour un rustre inculte ou, pire, un homme irrespectueux du protocole et de l'étiquette. Lorsqu'il apercu Ethan seul marchant à travers la foule, il préféra s'éloigner des deux femmes et de rejoindre l'Ambassadeur.

" Ethan, lanca-t-il en se fendant d'un large sourire, je suis heureux de vous revoir. "

Ethan se trouvait non loin de la Grande Prêtresse, a quelque pas et semblait se perdre dans sa contemplation. Il remarqua enfin son ami. Lui parlant apparté :

_ Elder ? Je suis surpris de vous voir ici. Comment allez-vous ? Avez-vous fait bon voyage ? Je vois que Veracle Khan vous a accompagné, le trajet s'est-il bien déroulé ? demanda-t il avec un léger sourire aux lèvres.
Ne lui laissant pas le temps de répondre il l'entraîna dans le petit groupe dans lequel se trouvait la grande Prêtresse.

_ Venez, la Baronne Enimia Sidh veut nous présenter à son futur mari. Notre Grande Prêtresse nous introduira.

Discuter avec l’Intendant Aectelion d’Istria d’Arkspel était toujours un plaisir… Celui de converser avec homme d’honneur et représentant si bien le peuple Kandrasien à lui seul. Il est clair que celui-ci avait beaucoup à faire, mais il trouvait toujours le temps de consacrer quelques minutes de son temps avec l’ambassadeur Beilanais.
Celui-ci avait salué les seigneurs Kandrasiens avec respect et avait pris part à une discussion sur un évènement survenu il y avait peu aux abords de la frontière non loin de l’Empersiste. La surpopulation de ces contrées et son silence avait entamé d’inquiéter plus d’un seigneur de Retrahant, mais il semblait qu’un changement prochain serait palpable.

Elderan Kar entraperçut l’entrée Graméenne alors qu’il écoutait une explication sur la formation disciplinaire de la Garde Pourpre.

Beaucoup de ragots et histoires circulaient sur ces seigneurs des marais… Le climat et l’environnement rude avaient façonné ces populations dans une optique de résister, survivre et d’agir en conséquence. La montagne avait ses ressemblances avec ces contrées dîtes austères et peu recommandables. Mornemares ne doivient pas être si différentes des marais de la Gramée après tout…

Nombres avaient été les guerriers des Glacées enrôlés de force dans des conflits ne les concernant nullement… Les guerres, jadis sous l’influence religieuse des deux partis, avaient été les plus dévastatrices de ces derniers siècles et peu de gens n’étaient pas au courant de la période d’hégémonie de la Gramée sur l’Empersiste ou des grandes Croisades Gaediennes sur « les terres des fiélons »…

Il était donc temps de se présenter, il salua les seigneurs Kandrasiens avec courtoisie et disposa…

Grand et massif, habillé d’atours de Tourage et ce malgré le raffinement des Froidmarches, le Baron de Tourage avait toujours impressionné par son apparence. Un ambassadeur du Beilan « barbare », austère et ne comprenant sûrement pas les us et coutumes des seigneurs et nobles de Retrahant.

Ol zhah biu bel'la ulu fridish l' sengeren d' Gram l' uss…
(C’est un honneur de saluer le peuple de Gramée)

Les seigneurs Graméens se tournèrent vers lui… Un mélange d’agacement ou d’étonnement… A plus fortes raisons, il avait attiré leur regard et pour une fois, non pas du fait de son apparence…

Il regarda les seigneurs un à un. L’Intendante Doubiah Feld Magrath, jeune et belle, sombre de surcroit, Le Grand Khan Veracle de Milatika, imposant et sans doute tenace, l’ambassadeur et seigneur Ethan Brumacier, raffiné et sûrement très bon orateur d’après les ouies dir et le seigneur Elder de Vélidian, ville prospère de la Gramée.

Je suis le Baron Elderan Kar de Tourage, seigneur Beilanais...

Les Seigneurs graméens furent présentés à Enimia et à Aectellion.

Seigneur Elder de Vélidian, je ne vous ai pas salué précédemment, veuillez m’en excuser. Aectellion m’avait dit que vous feriez partie de la délégation graméenne mais ne connaissant pas vos armoiries, je ne pouvais vous reconnaître. D’après ce que l’on m’a dit, vous n’appartenez pas à la confrérie des khans. Est ce un choix ou n’avez-vous pas été encore accepté au sein de cette célèbre confrérie ?

Ne m’en veuillez pas si je semble si curieuse concernant les khans. Mais, voyez-vous lorsque j’étais jeune, mon père menaçait mes frères, lorsqu’ils fautaient ou n’étaient pas respectueux envers lui, qu’ils seraient punis par des guerriers des marais que l’on nommait Khan. Ces guerriers allaient venir les enlever, les torturer et ils mourraient dans d’atroces souffrances. Amusant non ?

Les menaces de mon père à l’égard de mes frères ont marqué mon esprit et j’imaginais les Khans comme de monstrueux guerriers. En vous regardant, Ambassadeur Ethan Brumacier, je constate que je me suis trompé. Vous ne ressemblez pas à un monstre, loin de là.

Elle marqua une pause et regarda Doubiah, elle avait noté une complicité suspecte entre l’intendante et son ambassadeur.

Il semble même que certaine personne ne soit pas insensible à vos charmes.

Néanmoins, avant l’épidémie, il en reste pas moins vrai que les khans et les graméens, en général, avaient une très mauvaise réputation au Beilan à cause de leurs excursions dans notre territoire et de leurs pillages des cités mal défendues. Qu’en était-il en Kandrasie, Aectellion ?

Enfin, cela était avant l’épidémie, espérons que cela ne se reproduise pas. N’est-ce pas ?

Sinon, mon ami le Baron Elderan Kar, nous a enfin rejoint.

Enimia fit un regard désapprobateur à Elderan non dévolu d’humour.

Vous m’abandonnez Baron, il semble que vous préférez converser avec les kandrasiens. Je ne savais pas que vous me trouviez si ennuyante. Mais, je vous l'accorde, certains kandrasiens sont plus que passionnants.

Elle regarda Aectellion avec un grand sourire puis reprit en regardant l'ambassadeur de Gramée.

Seigneur Ethan Brumacier, il serait, en effet, important que vous discutiez avec notre ambassadeur des relations entre le Royaume de l’Elbre et la Gramée. Peut-être aurez-vous également l’opportunité de vous entretenirr avec notre Roy qui doit venir assister à mon mariage ?

En ce qui me concerne, je souhaite la paix. Je suis issue d’une famille de prince-marchand, de nobles qui ont assuré la prospérité de leur cité par le commerce, si vous préférez, et la guerre nuit à nos activités.

Le groupe s’élargissait, occupant plus d’espace, attirant les regards. Réunion hétéroclite mélangeant Seigneurs de tout horizon. Ethan ne perdait pas un mot de la conversation.
Il avait été fort surpris par l’apparence du Seigneur des Tourages puissant et massif. Tous deux travaillant en qualité d’ambassadeur et offrant un contraste saisissant. Ethan était de petite taille, svelte, sa carrure étriquée ne rappelait aucunement celle d’un guerrier. Une épaisse chevelure châtain encadrait un visage doux aux contours lisses ; les yeux des Brumacier - gris - apportaient une nuance de froideur et contrastaient avec sa peau mate graméene.

Il salua le Baron Elderan Kar selon l’étiquette et prit la parole.

_ Vos paroles vous honorent Dame du Beilan. Je pense comme vous que la paix est la plus sage des solutions. Cependant beaucoup ne sont pas de cet avis ; malheureusement je crains qu’il existe toujours des hommes belliqueux prêt à tout pour une parcelle de pouvoir.

Se tournant vers le Baron Elderan Kar :

_ Je prendrai contact avec votre ambassade dès la fin du mariage. Ne laissons pas des questions politiques gâcher cet événement. J’espère que nous trouverons rapidement un terrain d‘entente.

Reprenant de plus belles mais cette fois-ci sur un sujet plus léger il s’adressa à la Baronne. Ce faisant un sourire discret éclairait les commissures de ses lèvres :

_ Votre père avait en partie raison. Les Khans étaient de puissants guerriers. Un climat rude crée des hommes dures et les nôtres étaient impétueux. Nous verrons ce que la nouvelle confrérie nous réservera mais je sais que le même feu parcoure leur veine et il en faudrait peu pour attiser la flamme. Les monstres du passé reviendraient alors croquer les méchants petits enfants …

Ethan regardait ses convives, l’ironie n’avait pas échappé à la délégation graméène. Ce faisant lorsque son regard se posa sur Doubiah, ses yeux gris aciers pétillèrent et son expression se transforma. C’est comme si l’ambassadeur oubliait que les regards étaient momentanément posés sur lui. Il se ressaisit et reprit :

_ Il est vrai que nos deux nations furent souvent en guerre mais j’espère sincèrement que l’avenir sera plus plaisant. Je serai ravi de visiter votre pays si des tractations devaient avoir lieux. Ce doit être un royaume charmant.

L’ambassadeur s’arrêta, son imagination se perdant dans ce pays lointain.

Le seigneur de Vélidian fut surpris de constater que la Baronne nourrissait autant d'animosité à l'égard des Khans, peut-être parce qu'il avait jusque là tout ignoré de l'histoire de la Gramée, de cette sombre époque dont on parle encore avec effroi et que les contes se sont chargés de transformer peu à peu. Il fut particulièrement étonné de constater qu'il en apprenait plus sur son propre royaume à l'étranger qu'en Gramée même.
Lorsque chacun eut fini d'adresser diverses politesses et signes de présentation à ses interlocuteurs, Elder préféra répondre tardivement à la Baronne plutôt que de délaisser ses interrogations.

" Ma dame,lanca-t-il à l'attention d'Enimia Sidh, j'ignore bien des choses au sujet de la Confrérie des Khans, mais ils ne me sont jamais apparu comme des monstres. Peut-être les choses ont-elles bien changés depuis tout ce temps ? Quoiqu'il en soit, je désirais répondre à votre question : sachez que je ne suis pas membre des Khans car je n'en ai nullement émis le souhait. Voyez-vous, et je vous demande de me pardonner s'il vous semble que je raconte un trop ma vie par ici, mais ma contrée a longtemps connu l'isolement, et les différences culturelles avec la Gramée sont importantes. "

Il marqua une pause, puis observa ses intelocuteurs et particulièrement cet homme à l'apparence étrange, Elderan Kar, dont l'allure traduisait autant celle d'un diplomate que la démarche de la Grande Prêtresse se rapprochait de celle d'une bûcheronne. En somme, il avait du mal à se représenter cet individu, tout en carure et en puissance, comme un maître des mots et de la paix. Cela dit, il était stupide de juger en fonction de l'apparence, et le graméen préféra revenir sur son sujet d'origine.

" La confrérie des Khans m'est longtemps apparue comme une spécificité culturelle de la Gramée, et il me semblerai prématuré de les rejoindre maintenant. Sans doute cet honneur pourra-t-il revenir à l'un de mes probables descendants ? Mais je concois la souffrance qui doit être la vôtre sur ce sujet et j'aime autant vous rassurer sur un point, en ce qui me concerne, la guerre n'est pas mon sujet de prédilection, et la torture ou l'enlèvement ne figurent pas sur la liste de mes distractions.
Mais comme le disait très justement notre Intendant, ne gâchons point les festivités par ce genre de considérations. "

Comme pour changer de sujet, le Seigneur de Vélidian entraina la discussion sur une domaine.

" J'ai pu constater que les hommes et femmes du Beilan et de Kandrasie étaient des gens de bon goùt. Il me plairait de deviser avec l'un ou l'autre d'entre vous et d'apprendre un peu plus de votre culture qui, d'après ce que je peux en voir, m'a l'air fort riche et intéressante. "

Enimia répondit, tout d’abord, à l’ambassadeur, un peu gênée par son avant-dernière réplique, bien qu’elle pensât que ces propos n’étaient pas à prendre au premier degré.

Vous avez tort d’ironiser sur un sujet aussi délicat. Voyez-vous les Sidhs n’ont jamais été attaqués par des Seigneurs graméens. Que Gaëd préserve l’îlot de la Perfidie.
Mais, ce n’est pas le cas de nombreuses cités du Royaume de l’Elbre et même, de ma région, le Delta. Les beilannais ont gardé un certain ressentiment envers votre peuple. Ceci explique la raison pour laquelle mon père utilisait ce stratagème de la menace des khans, les guerriers les plus redoutables de Gramée, pour faire rentrer dans l’ordre mes deux frères, alors que je le répète, nous n’avons jamais été ni menacé ni agressé par eux.
Loin de moi l’idée, d’émettre un jugement sur votre confrérie ni sur les événements précédant l’épidémie. Non pas, car je ne suis pas sans savoir que critiquer les Khans est aussi dangereux que de contester la légitimité du peuple aevenspeer au mercenariat, mais plutôt car je pense que, dans tout conflit, les tords sont souvent partagés et que cela appartient au passé.
Je pense que je suis parmi les dirigeants des cités au Royaume de l’Elbre, celle qui est la moins hostile à votre égard. J’espère que le temps pansera les plaies entre nos peuples. De plus, si vos frères sont aussi pacifiques que vous, les temps s’annoncent meilleurs. Je serais, alors, heureuse de pouvoir vous faire visiter le Delta et l’îlot de la Perfidie.

Le Seigneur de Vélidian ne correspondait pas à l’image des graméens que se faisait Enimia. Le Seigneur Ethan Brumacier était un diplomate qui devait, à cause de sa fonction, être consensuel. Mais, le Seigneur de Vélidian n’avait pas ces obligations et il semblait sincère.

La confrérie des Khans vous apparaît comme une spécificité culturelle de la Gramée. Hmm, je doute que le Grand Khan pense diriger un clan appartenant au folklore culturel graméen.
Par ailleurs, j’ignorais qu’il existait des différences culturelles importantes en Gramée. Je voyais le peuple graméen, non pas homogène par ses origines, mais homogène dans sa culture imprégnée par votre Dieu Arm Cherk. D’ailleurs, vous-même, vous êtes un adorateur d’Arm Cherk, non ?

Mais, je vais moi-même tenter de vous renseigner sur le Royaume de l’Elbre. Bien que malheureusement, je ne sois pas très représentative de ce territoire. Par mon père, j’appartiens à une petite minorité, les Héosiens. Le Beilan est un territoire assez hétérogène qui s’étend le long du fleuve, l’Elbre. Pour illustrer mes propos, il suffit de comparer Svold kastriss, mon conseiller, et le Baron Elderan Kar. Le Beilan est divisé en région telle que le Delta, en ce qui me concerne, et les glacées en ce qui concerne le Baron. Mais, le Piedmont regroupe la plupart des cités beilannaises, peut-être croiserez-vous la Marquise Aliénor, elle m’a dit qu’elle viendrait à mon mariage. Selon les régions, on y rencontre de nombreux peuples différents, chacuns ayant leurs particularités culturelles. Les héosiens dont est issu ma famille, les Sidhs, peuplent principalement le Delta. La religion la plus répandue est le Gaëdisme, mais elle n’est pas la seule. Malgré cette diversité, la cohésion de notre territoire est garantie par notre Roy. Si vous voulez plus de renseignements, n’hésitez pas à me poser des questions, je me ferai un plaisir de vous renseigner dans la limite de mes connaissances.

L'explication d'Enimia Sidh fut relativement instructive pour le seigneur Graméen, lui qui, quelques jours auparavant, ne voyait dans ces territoires étrangers qu'un ensemble de cultures monolithiques, chacune trempée dans le même modèle, imprégnée de la même histoire. Il apercevait maintenant les nuances qui distinguaient ces différents royaume, et mieux, il approchait les subtilités de chacun d'entre eux, les particularités régionales qui les composaient et les soudaient comme un ensemble cohérent. Bien qu'il fut étonnant qu'une telle disparité culturelle soit source de richesses et non de querelles internes, il était évident pour le seigneur de Vélidian que le Beilan tirait sa force de cette harmonie et de cette organisation, obtenue dans le temps et le sacrifice, et dont il semblait maintenant difficile d'en briser l'unité. Quelque conflit qui se déroulerait un jour dans ce royaume ne suffirait probablement pas à remettre en cause cet acquis précieux.

" En ce qui concerne les Khans, répondit-il à l'adresse de la Baronne, il me semble nécessaire d'apporter ici une précision. La Confrérie appartient au folklore culturel Graméen dans ce sens qu'elle constitue une particularité de notre Royaume. Sans trop me risquer à des prétentions qui dépasseraient mes connaissances, il me semble peu probable de croiser une semblable confrérie en Enpersiste ou même au Beilan, tout simplement car les Khans voient leurs origine dans l'histoire et la culture particulières de la Gramée. Jusqu'à présent, Vélidian ne faisait pas partie de la Gramée culturelle, et ce rapprochement s'est fait progressivement, notamment par des villes cotières de notre Royaume, comme Sâr, la cité de notre Ambassadeur estimé."

Elder eut pour Ethan une pensée qui se détourna, au gré des humeurs de l'esprit, vers sa famille et sa ville natale, dont il espérait qu'elles ne souffrent pas de son absence. Jugeant néanmoins que ces détails n'avaient pas leur place en cet instant, il les chassa pour retrouver le fil de sa discussion.

"Voyez-vous, il est important que des villes assurent le relais culturel d'un Royaume, car cela créé des rapprochements qui, par le suite, se retrouvent être sources de richesse et de partage. Nous avons rejoins la Gramée au fil du temps, par le biais de relations diverses et prolongées. Pour autant, ce choix s'est révélé être le bon et nous regrettons seulement de ne pas avoir officiellement rejoins la Gramée quelques dizaines d'années auparavant. Mais quoiqu'il en soit, ce long isolement a tout de même eu quelques avantages, au nombre desquels je crois important de mentionner nos différences d'approches et de points de vue."

Elder de Vélidian n'osa pas déclarer à quel point ces différences étaient importantes. Lorsque la Baronne entraîna la discussions sur le terrain de la religion, ses pensées sursautèrent et son regard passa brièvement de la Grande Prêtresse au Grand Khan, avant de revenir se poser sur les yeux de la future mariée. Lorsque l'on était originaire de Gramée et que l'on appartenait à la noblesse, il etait difficile de nier la croyance en Arm Cherk. Non que le seigneur de Vélidian eut ce désir blasphématoire, mais que la croyance en l'Unique n'était certainement pas exclusive, s'entremélant chez le graméen d'un animisme hérité au sein de sa contrée natale.

" Bien évidemment, finit-il par répondre, ma seule foi va pour Arm Cherk. Mais je ne suis guère homme de foi, et je laisse tout cela aux membres du clergé. Pour ma part, je me contente de croire en l'Unique et de suivre sa volonté. J'ai d'ailleurs été surpris de constater à quel point notre croyance soulevait animosité et méfiance auprès des étrangers. Avec cela et les Khan, je vais finir par croire que la Gramée souffre d'une mauvaise réputation."

Elder accompagna sa dernière phrase d'un petit sourire entendu, mais évita d'observer ses congénères.

Elder accompagna sa dernière phrase d'un petit sourire entendu, mais évita d'observer ses congénères. L'ambassadeur enchaîna :

_ Baronne Enimia Sidh si je vous ai déplu veuillez m'en excuser : je ne cherchais nullement la querelle ou la moquerie. La manière de faire peur aux enfants m'a paru cocasse, ce n'est que ce que j'ai voulu souligner. Mais vous avez raison, notre histoire est trop chargée pour qu'on puisse goûter à ce genre d'ironie.
Comme vous le disiez le passé est le passé et je préfère vivre le présent que de ressasser. Laissons-là pour le moment cet épineux problème ...

Vous nous avez parlé du Beilan et le Seigneur de Vélidian de la Gramée par le biais de sa ville. J'ai pour ma part une question sur le Beilan - puisque vous avez offert d'y répondre. Vous nous parliez de plusieurs ethnies placées sous la coupe d'un Roy. Comment ce Roy est-il arrivé au pouvoir ? Et s'il fait partie d'une des ethnies, n'y a-t il pas de problèmes de partialité ?

Ethan attendit la réponse espérant ne pas avoir touché à un sujet tabou ou froissé un des convives.

Le seigneur de Vélidian n'en croyait pas ses oreilles. Véracle était en train de faire une scène parce qu'il n'avait pas apprécié un simple terme, capricieux qu'il était, enfant gâté qui aurait dû connaître une éducation décente avant d'arriver à un tel poste. Elder se mordait les doigt de n'avoir pas été plus explicite envers la Baronne, et maintenant il en payait le prix, tout la délégation en payait le prix. Cet homme, ce rustre sans distinction et sans subtilité qui prenait mouche pour chaque phrase avant de tenter de les comprendre s'était emporté, ici et maintenant, au dernier endroit souhaité. Le graméen espérait pouvoir rattraper la chose lorsque l'autre reviendrait.

" Ma Dame, je vous prie d'accepter nos excuses pour ce léger débordement, je me dois d'être plus précis à votre égard ainsi qu'à celui de notre estimé ( le mot ne respirait pas la sincérité, mais à ce stade des choses, le noble n'en avait cure ) Grand Khan. "

Celui-ci revint, certainement après s'être raffraichi.

" Ce que je tentais d'expliquer tout à l'heure, et j'espère cette fois que vous tenterez de m'écouter avant de vous emporter ( il avait prononcé cette dernière phrase plus bas ), c'est que la Confrérie est intimement liée à la Gramée, elle en est une composante. Est-ce mal que de dire cela ? Est-ce insultant ? je ne crois pas. Loin de moi l'idée que les Khans n'étaient qu'une particularité de notre paysage floklorique, telle une attraction pour visiteurs étrangers, à l'instar d'une musique ou d'un conte que l'on se transmettrait de génération en génération. Ce que je disais, c'est que si la réputation des Khans les précédent désormais dans tous les royaumes, ce n'est certes pas une institution que chacun pourrait rallier à sa guise. "

Elder de Vélidian marqua une pausa et observa le Grand Khan, tentant de deviner si ses paroles avaient été comprises. Jugeant qu'il valait mieux en rajouter au risque d'être à nouveau incomprit, il relanca son monologue, en prenant soin de détacher chaque mot pour être le plus audible possible.

" Or donc, Vélidian n'était, il y a quelques années, qu'une ville étrangère, peut-être parciellement, mais suffisamment en tout cas pour que j'estime ne pas être en mesure de postuler auprès des Khans. Car cela demanderait une connaissance de la Confrérie, ainsi que de la religion, voire même de la culture graméenne, que je m'efforce d'acquérir mais ne possède point. Est-là également une insulte ? Prenez-vous chaque référence à la culture d'un royaume comme une offense que vous vous devez de corriger dans la rage et la colère ? "

Après ces quelques phrases, le seigneur graméen tentait de se calmer et de reprendre confiance. La fierté du Grand Khan était facile à toucher, certainement plus par les mots que les actes, mais elle était relativement mal placée. Cet homme poserait bien des problèmes un jour, Elder le pressentait, mais il tentait au moins de calmer les choses pour le moment.

" Je comprend qu'il eut été diffcile de faire la nuance. Néanmoins, je vous prierais à l'avenir de vous adresser à moi autrement que par ce tutoiement dont la facilité d'usage respire l'absence de respect à l'égard des autres. "

Il n'avait pas pu s'en empêcher. Au diable la colère de cet homme dont il était las d'accueillir les sautes d'humeur. Qu'il continue si cela lui chante, et s'humilie ainsi devant tout le monde.

Ethan avait regardé l'échange et était devenu blême. Se donner ainsi en spectacle ... d'une voix froide et autoritaire il articula péniblement :

_ Commandeurs Elder de Vélidian et Véracle vous réglerez ce différent en privé. Chacun de vous deux s'est expliqué n'en rajoutez pas plus ici. Ne gâchons pas plus ces instants qui devraient être merveilleux pour les futurs mariés.

Ce tournant vers les deux futurs époux :

_ Je vous présente mes excuses pour cette altercation. Le voyage fut long et pénible, la chaleur n'est pas sans en rajouter et les graméens sont impulsifs.

Mais revenons à notre discussion sur votre territoire : le Beilan. Il est vrai que nous sommes voisins et que des traités pourraient être bénéfiques à nos deux nations.

Le ton de la voix d'Ethan était un peu guindé, il n'avait pas vraiment aprrécié les mots échangés par les graméens. Il radoucit sa voix sur sa fin de phrase et attendit que la conversation reparte de plus belle.

L e Grand Khan revient un godet a la main, il le tandis au Commandeur Elder.

allez cessons la cette discussion qui n'a ni queue ni tête. nous pourrions tellement en dire sur la Confrérie qui est cher a mon coeur et le voyage ma beaucoup affecter. Me sentir loin de ma forteresse m'irrite au plus point et comme le dit notre ami l'ambassadeur Ethan, la chaleur est très lourde. ceci étant

se tournant vers le petit cercle qui c'était former

veuillez messires et mesdames accepter mes plus sincères excuses pour mettre emportez a un moment ou la fête est de mise.

je lève donc mon godet pour souhaiter au futur époux, UNE LONGUE VIE

Véracle posa sa main sur l'épaule du Commandeur Elder pour lui signifier qu'il l'avait bien compris.

les discussions repris de plus belle. a voix basse, il dit a Elder

excuse moi mon ami mais tous ses seigneurs réunis me rende nerveux

La Grande Prêtresse semblait absente. Elle s'emerveillait devant tant de splendeur. Elle ne prêtait plus qu'une oreille distraite aux conversations qui l'entouraient. Certes, cela n'était pas très poli, mais elle ne s'en rendait même pas compte. Elle regardait tout autour d'elle. Puis son regard tomba de nouveau sur le jeune ambassadeur de Gramée, en pleine discussion avec des gens qu'elle ne connaissait pas... Un éclat de voix de son oncle la fit revenir à la réalité. Ah, celui là... Il ne descend pas d'Atika pas hasard. Et s'il a en plus hérité d'une partie du caractère de Milagrine... Elle porta de nouveau son regard vers les personnes qui discutaient avec Ethan. Bien sûr que si ! Elle les connaissait. Tous lui avaient été présentés... Elle manquait là à tous ses devoirs. C'était contraire à tout ce qu'on lui avait enseigné depuis sa plus tendre enfance. "Ah.... Ethan.... Tu me fais tourner la tête".
Elle reprit aussitôt par à la conversation.

"Veuillez me pardonner pour cette 'absence', Majesté, Baronne. Ce la ne me ressemble pas et je suis d'habitude beaucoup plus attentive. Peut être est ce le voyage qui m'a fatiguée...
Je vous salue également Baron Elderan Kar.

Je crois Majesté, que mes deux compagnons se sont présentés d'eux mêmes. Le Grand Khan et le seigneur de Vélidian sont tous deux prompts à s'emporter."

Se tournant vers les deux Graméens :

"Messires, je compte sur vous pour respecter à la lettre ce que viens de vous dire l'ambassadeur. Cette histoire ne regarde que vous deux et nos hôtes n'ont pas à y être mêlés. Encore une incartade de ce type et je me verrais dans l'obligation de vous renvoyer au campement avec ordre de ne plus en sortir jusqu'à notre retour en Gramée. Ai-je été assez claire ?"

S'adressant de nouveau à ses hôtes :

"Veuillez acceptez mes excuses pour ce comportement... déplacé. J'espère que cela ne se reproduira plus. Mais le Grand Khan à eu une parole sage. Si vous le permettez, je lèverai mon verre à votre bonheur ! Prince Aectelion... Baronne Enimia...

Baronne... Je sais que le moment est très mal choisi, mais pourriez vous m'accorder une audience privée. Au moment qui vous ira, bien entendu."