[Assemblée d'Ephyne] Troupes armées fironkoises

L'intendant d'Ephyne Dylan Selden portait une habituelle tenue religieuse, une toge dédiée à Gaed et portant les attributs de son représentant sur Retrahant. Il se tenait dans la tribune empersoise et se tourna discrètement vers les émissaires fironkois pour s'entretenir avec eux d'une affaire annexe.

"Messires ambassadeurs, j'espère que vous vous trouvez bien installés à Ephyne ; le quartier des ambassadeurs a été rénové récemment et vous avez donc pu vous installer dans vos bâtiments où vous pouvez faire ce que bon vous semble tant que cela ne trouble pas la quiétude des lieux."

Son sourire qui s'affichait lorsqu'il déclinait ces explications s'estompa légèrement après un bref instant de silence.

"Il semble cependant que vous trouviez cette hospitalité trop légère, probablement le mal du pays ou je ne sais quelle explication mais on m'a rapporté des déplacements de troupes armées à l'intérieur des terres d'Empersiste à destination des principales cités du territoire gaedien dont je suis le souverain.

Pour leur propre sécurité je vous demande de les faire revenir d'ici deux semaines à Ephyne où ils déposeront leurs armes avant de rejoindre votre ambassade ou cette assemblée, comme bon vous semblera. Je vous ai envoyé voici quelques jours une missive à ce propos et elle est restée pour le moment sans suites."

Il prit un air préoccupé avant de poursuivre.

"On m'a rapporté un fâcheux incident, vos spadassins ayant franchi des terres privées appartenant à un seigneur empersois. Il semble qu'ils aient refusé de déposer les armes malgré leur comportement, pardonnez moi l'expression "d'espions" et qu'il ait donc fallu en venir aux mains pour les ramener à plus de civilités.

Nous ne souhaitons pas que de tels évènements se reproduisent, vous êtes acceptés avec plaisir à Ephyne en tant qu'invités mais nous refusons de vous voir fouiller dans nos caves, nos greniers ou nos salons à la recherche de je ne sais quoi.

Vous avez deux semaines pour comprendre que nous sommes chez nous, passé ce délai nous vous l'expliquerons d'une manière plus compréhensible."

Les vieillards, qui n'avaient pas été informés des nouvelles lubies de leur maître, étaient un peu déboussolés. Ils se consultèrent un moment, puis comprirent bien que les deux parties s'enfonçaient à nouveau dans la mauvaise foi, chose qu'appréciait particulièrement leur commandant. Pendant leur discussion, une estafette arriva et leur apprit la mort d'un de ces gardes, celui-là même qui avait été décrit par l'intendant d'Ephyne. Leur vieux sang bouillit un instant, et le plus connu des vieux Fironkois, la face toute rouge, prit la parole.

"Deux semaines, c'est ce qu'il faut pour traverser le tiers de la distance située entre Ephyne et sa plus proche frontière. Nous ne pouvons les prévenir tous en si peu de temps, vous le savez bien.

Nous vous présentons nos excuses pour ce pauvre hère qui a traversé les terrains privés de l'un de vos seigneurs. A croire qu'il n'a pas su voir les pancartes "propriété privée, entrée interdite" qu'il a croisé.

Enfin, nous sommes fort navrés de voir que vous nous compariez à des voleurs qui fouilleraient vos caves et vos maisons. Vous qui sembliez être un homme qui aimait répandre vos ambassades dans le monde, et qui avez poussé si loin votre passion que vous avez envoyé quelque troupe à Elderine, la capitale même du pays que vous aviez trahi il y a peu, nous croyions trouver quelque compréhension en votre personne. Enfin, quelque compréhension autre que celle qui consiste à recourir à la force.

Mais soit, nous allons demander des directives à notre Commandeur. Nous sommes par trop faibles pour prendre nous mêmes des décisions, vous vous en doutez bien."

"Les cités concernées étaient à portée de vos messagers pusique j'ai eu le temps d'échanger deux missives avec les seigneurs empersois. Avisez votre maître qu'il ne sera rien fait à ses émissaires mais que ses gardes du corps devront laisser leurs armes. Ils ont reçu des instructions sur place, je vous rassure. Leur ballade dans la campagne ne dépend que de leur bonne, ou de leur mauvaise foi. Ils reviennent à Ephyne ou déposent leurs armes et restent là où ils ont imposé leur présence. Notre civilité nous impose de leur dresser le couvert mais là s'arrêtent vos droits.

Pour répondre à vos interrogations, contrairement à la Kandrasie vous avez reçu des consignes, avez largement eu le temps de les appliquer et seule une allure menaçante risque d'attirer des ennuis à vos gardes du corps.

Je précise aussi que la grande majorité des cités du territoire ont été inspectées et que vos envoyés ont apprécié s'arrêter pour admirer le paysage de nos murailles et détailler les défenses protégeant nos familles. Nous ne vous demandons pas votre avis de toute manière, rien ne vous sera fait si vous quittez le pays ou respectez nos coutumes. Vous avez été informés, vous avez des choix à faire et à assumer."

"Vous disposez, pour votre part, de chevaux et de pigeons dévolus à la communication entre Ephyne et ses cités. Ce n'est pas notre cas, doux sire. Nous sommes de... (sourire retors) simples barbares démunis, comprenez-vous ? Nous n'avons pas encore saisi l'intérêt de disposer de volères ou d'écuries, et ainsi les échanges entre différents ambassadeurs fironkois sont lents.

Quant à vos directives, en effet nous venons de les recevoir. Nous en sommes fort aise. Il est tout de même dommage de ne pas avoir reçu ces ordres préalables avant l'arrivée des gardes.

Enfin, pour les Fironkois s'étant arrêtés devant vos défenses... Tout être doué de raison s'arrêterait pour admirer la puissance d'Empersiste. Même les Fironkois, qui sont des sauvages, doivent être saisis par ce même sentiment, sire."

L'intendant d'Ephyne observa ses interlocuteurs le regard sceptique et légèrement amusé.

"Les fironkois que vous décrivez comme des faibles d'esprit, ce dont je doute, voyageraient en Empersiste pour admirer le paysage ? C'est ridicule et l'utilité méchappe tout de même beaucoup. Que vous veniez rendre visite peut se concevoir mais venir pour le plaisir de regarder et d'observer c'est tout de même surprenant"

"C'est toute une autre culture" ajouta-t'il en chuchottant à un de ses seigneurs.

Quelques mois plus tard Dylan Selden se pencha de nouveau sur le problème en s'adressant à la tribune fironkoise.

"Il semble que malgré vos réticences tout soit désormais achevé. Sachez que vous êtes toujours les bienvenus à Ephyne, bien évidemment sans trop d'étalage d'armes.

Le même procédé sera désormais appliqué sans délai quelle que soit l'origine du visiteur ; si ce dernier est accompagné d'une troupe armée les gardes du corps dépendront du bon vouloir du seigneur visité. Nous ne sommes pas prêts à laisser n'importe quel espion fouiner sur nos terres."