Prise d'Aralnia en Aevenspir

Anyaïs de Blanchelicorne foudroyait du regard les généraux de son armées. D'une colère froide, elle leur lança :

- Mais quelle ennui, cette offensive, par l'Elbre et les Scirjii, quelle barbe et quelle...

- Sauf votre respect, Demoiselle, vous n'en avez fort heureusement pas et...

- Je m'en moque ! Je possède des milliers d'hommes et de cavaliers, et ils m'annoncent n'être absolument pas capable de fonder un simple avant poste !

- Votre force est puissante, il est tout à fait normal de prendre ce que cette force vous permet de...

- Raaah... Assez. Vous ferez parvenir en main propre une missive d'excuse à ce seigneur Drakvein que nous attaquons lâchement. Sur-le-champ ! Et surtout, vous préciserez que mon soutien militaire lui est acquis pour lui éviter absolument le risque d'un nouvel exil lorsqu'il fondera une nouvelle cité. Il pourra donc défricher dès la première saison.

Sitôt arrivés en Aevenspir, Anyaïs avait été contrainte d'accepter ce que son armée lui imposait : prendre une ville par la force car celle-ci n'avait pas la compétence pour en bâtir une nouvelle. Fainéantise, pensait-elle, mais en attendant ils avaient gagnés et campaient sur leur position. Les premiers morts gisaient sous les fortifications de la malheureuse cible, la cité d'Aralnia, les malchanceux volontaires au maniement du bélier. Il n'y avait pas le temps de construire des trébuchets, bien entendu.
Soudain, un soldat accourut et cria :

- Maîtresse ! La porte de la cité vacille ! Encore un coup et...

A ce moment, une clameur s'éleva, et les archers de l'Ost de la Licorne brisèrent la charge désespérée des derniers défenseurs.

Désormais, Aralnia serait rebaptisée Blanchelicorne.

La rumeur s'était vite répandue en Aevenspir. Les mineurs parlaient beaucoup, et les Seigneurs Aevenspeers avaient vite été informés. Certains parraissaient enchantés du retour de la nièce du grand Estreval... Mais d'autres, comme les Nils, ne voyaient pas les choses du même oeil.

Folmar et Loktar, les deux frêres Nils, n'avaient déjà pas apprécié le départ d'Anyaïs. En Aevenspir, on entendait souvent les mêmes choses sur elle: "Traîtresse", "Honteuse", "Lâche", fusaient dans les tavernes. Mais avec le temps, le sujet avait disparu des montagnes.

Or Anyaïs avait décidé de revenir. Mais ce retour était tâché de sang. La jeune femme avait en effet chassé un frêre Aevenspeer de ses terres pour s'installer, et elle avait même osé rebaptiser sa ville Blanchelicorne.

Le Seigneur Drakveirn, qui n'avait rien demandé et qui n'avait rien pu faire, ne méritait pas ce sort. Les deux frêres Nils se concertèrent longuement, et décidèrent d'agir, sans demander l'accord des Ewspers ou du Karsper.

- De toute façon, qu'est-ce qu'on craint? C'est elle qu'est en tort, pas nous!! Et puis l'avait qu'à pas faire ça, bon sang!! clama l'ainé, Folmar.
- Soit, préparons les hommes. Nos frêres Aevenspeers ont été assassinés, vengeance doit être faite.
- Ouais, et puis les autres décident jamais de rien!!

Le lendemain, les armées étaient prêtes. Il fallait prendre l'ennemi le plus tôt possible, pour qu'il n'ait pas le temps de se préparer.

En chemin, les rires gutturaux s'élevaient par milliers, alors que les hommes continuaient d'avancer. La plupart des combattants ne portaient pas de cottes de mailles, mais une peau de bête à la peau dure, qui protégeait un peu des flèches.

L'arrivée devant Aralnia se fit sans problème. Les armées des Nils se préparèrent, pendant que les deux frêres et les généraux établisaient les plans. Folmar avait une grande expérience des combats, grâce à son passé de mercenaire endurçi. Après réflexion, ils décidèrent d'enfoncer la porte au bélier.

Nombreux furent les volontaires pour porter le bélier. Les contremaîtres des mines, qui prenaient en temps de guerre les places de chef, ordonnèrent aux cent plus forts d'aller emboutir la porte. Chose faite rapidement, les gaillards maniant le bélier aussi aisément que la pioche.

La porte enfoncée, on vit rapidement les défenseurs, qui essayaient de s’organiser. Mais ils venaient d'arriver, et leur campement n'était pas prêt. Ils avaient tout de même eu le temps de préparer leurs troupes. Les Nils, qui regardaient la scène depuis l'arrière, ordonnèrent l'assaut. Des milliers de mineurs s'engoufrèrent dans le trou béant qui accueillait précédement la porte, mais il furent repoussés par les archers ennemis, qui étaient nombreux et qui firent beaucoup de pertes.

Les Nils ordonnèrent à leurs hommes de sortir de la ville. Il fallait attendre l'ennemi dehors. Il ne se fit pas attendre longtemps. De fiers cavaliers lanciers sortirent de la ville assiègée. Ils se préparèrent à charger, et les deux frêres purent apreçevoir leurs hommes reculer d'un pas. Le choc fut violent: les calvaliers lanciers empallèrent de nombreux soldats de Loktar, mais les hommes tinrent bon et les cavaliers furent décimés.

La suite fut assez sanglante. Les soldats déboulèrent dans la ville massacrant les derniers soldats. Cependant les Nils avaient interdit de toucher aux civils, ce que les soldats ne firent pas. La bataille avait été remportée par les Nils, mais les soldats expérimentés d'Anyaïs avaient tout de même causé beaucoup de pertes... La vallée dans laquelle se trouvait Aralnia comptait déjà beaucoup de corbeaux. Mais Drakveirn avait été vengé, et c'était le plus important.

Cependant, on ne trouva aucune trace d'Anyaïs... Où était-elle?

Comment cela avait-il donc été possible ? Seule la cavalerie était en poste, l'infanterie et l'archerie étant en manoeuvre. C'est ainsi que la Cavalerie de la Licorne périt, elle qui ne devait que soutenir le reste de l'armée. Quand celle-ci arriva, il était trop tard. Anyaïs avait combattu en armure, ainsi nul ne l'avait reconnue, mais elle était gravement blessée.

Les restes de l'armée, épuisées, se dirigèrent vers les terres graméennes. Anyaïs et son idéal avaient duré leur temps, dorénavant elle n'en aurait plus aucun, à moins qu'un jour quelque choc ne la fit revenir à la raison.

En effet, les Nils avaient pensé anéantir toute l'armée d'Anyais. Mais en réalité seule la cavalerie avait péri. Le reste était en route. Les hommes de Folmar était repartis chez eux, à Hantor, mais les soldats de Loktar étaient restés.

Les cadavres et blessés ennemis n'avaient pas été ramassés, et Anyais avait passé la nuit blessée, dans son armure, par terre.

Le lendemain, les armées de Loktar virent avec effroi le gros de l'armée d'Anyais arriver. Ils ne s'attendaient pas à ça... D'autant plus que juste après elles, ils virent les armées d'Ayhla (la fiancée de Loktar) arriver... Mais ces dernières n'étaient pas venu aider Loktar. Elles se rangèrent aux côtés des armées d'Anyais.

Loktar n'en revenait pas... Il ne comprenait plus rien. Cette histoire aller faire grand bruit en Aevenspir...

Le combat était inévitable. Les soldats des deux camps chargèrent, les pertes furent énormes, mais cette fois çi, les hommes de Loktar furent décimées. Heureusement pour ce dernier, il réussit à s'échapper avec ses généraux. Il avait échoué.

Désormais, l'Aevenspir était figé. Les armées ne bougeaient plus, et personne n'osait faire quoi que ce soit. La guerre civile pouvait éclater, opposant les Seigneurs épaulant Loktar et son frêre aux Seigneurs prennant le parti d'Anyais, comme Ayhla.

De son côté, Anyais fut ramassée par ses hommes sur le champ de bataille. Elle se rétablit assez vite, et l'on apprit plus tard qu'elle demandait l'accueil de la Gramée...

L'affaire se solda donc par de lourdes pertes, par l'exil du Seigneur Drakveirn, et par le départ d'Anyais pour la Gramée... Un gros gâchis.

La guere civile semblait se dissiper, les âmes se calmaient, mais rien n'était encore certain. Pour ce qui est du mariage de Loktar et d'Aylha (qui était prévu depuis longtemps et qui devait avoir lieu), Loktar était prêt à pardonner, mais apparement Aylha était très en colère... Affaire à suivre.

En route, Anyaïs sentait qu'elle ne tiendrait que par la force de sa volonté. Elle se remémora alors les pertes humaines induites par la malheureuse histoire de son arrivée. Elle imagina les implications. Mais comment cela avait-il pu arriver ?

Elle toussa. Une guerre civile entre frères aevenspeers ? A ce moment, elle perdit alors la volonté de se battre. Autant quitter ce monde, se dit-elle. Pourquoi survivre, taraudé par le remord ? Le reste de son armée pouvait se démobiliser - devait même. Elle n'avait plus la volonté de la gouverner.

La nuit était tombé, et le ciel brillait d'une multitude d'étoiles. Elle sourit, de ce premier sourire depuis ces sombres jours de batailles si peu glorieux. Je ne dois pas laisser le remord m'envahir, pensa-t'elle. Je vais partir en paix...

Elle ferma les yeux.