L'auberge de la This Caraïne

Quatre ou cinq soldats de l’armée territoriale de Kandrasie, depuis dix-sept saisons sous le commandement du croulant général Daerok venaient de disposer sur une table de Belte de quoi abreuver la population Fironkoise au grand complet ; l’intendant Aectelion Premier D’Istria Arkspel semblait au cœur de leurs préoccupations et les larges sourires qu’ils échangeaient avec la This Caraïne parvenant vivante jusqu’à eux auraient permis à n’importe quel spectateur averti de faire montre d’une certaine sagesse en prédisant un destin funeste à la boisson locale.

- On est les champions on est les champions on a on a on a pour intendant Aectelion
- Aectelion ! ! ! ! ! Aectelion ! ! ! ! ! ! Ouais ! ! ! ! ! !

Un fort parti empersois se trouvait hélas présent dans la même salle à quelques pas de là. Les nouvaux arrivants dont le beilanais à première vu assez coincé auraient sûrement rebroussé chemin sans le visage rassurant de l’honnête gérant au dessus du comptoir et les habitués semblaient peu contrariés de l’évolution du climat ambiant assez bon enfant ;
Un empersois riait à gorge déployée tentant tant bien que mal de maintenir sa bière sur un nez assez original aux origines probablement ciranaises aux vues de sa longueur et de sa rougeur exceptionnelles tandis que ses compatriotes entamaient un concours de bras de fer et de pied d’Eria avec les kandrasiens enthousiastes de trouver preneur à leurs jeux déjantés.

L’un d’eux, hilare venait de quitter prématurément une partie risquée avec un colosse empersois ayant sans doute possible abusé de soupe aevenspeer durant son enfance et se dirigeait vers la table du Beilanais deux choppes à la main.

- Allez une This Caraïne pour l’étranger à condition que vous nous hurliez « Vive Aectelion Premier » ; non je rigole vous n’avez pas pris cette table à l’écart pour fêter la victoire empersoise et kandrasienne.
Il se rapprocha brusquement de l’étranger, un sourire complice aux lèvres :
- Il parait que vous êtes beilanais d’après Theosarea alors dites moi, parle-t’on chez vous de notre jeune prince servant et de votre Enimia Sidh ?

Le Perfidien, qui avait pour nom Svold Kastriz, observait les soldats kandrasiens célébrant la prouesse de leur intendant qui, malgré son age avancé, avait terminé deuxième des joutes retranes. Il n’en était pas de même pour son jeune frère qui avait fait une joute désastreuse contre l’intendant d’Empersiste. En effet, il était le frère ainé du jouteur beilannais Wurz Kastriz et, en ce moment même, il espérait que personne ne lui demanderait son nom ou que tout le monde avait oublié le nom de son misérable frère, cet idiot s’était avéré incapable de tenir une épée. Cela dit, il avait perdu contre le vainqueur des joutes, bien mince réconfort…

Lorsque le soldat kandrasien lui tendit la chope de bière, il ne put éviter une grimace. Il n’appréciait guère que le vin délicat du Piedmont ou alors cette liqueur à base de myristinia, petit plante de la région du Delta, qui avait des vertus plus qu’euphorisantes. Néanmoins, il fit bon gré mal gré et tenta de monter une expression accueillante sur son visage austère. Il était entraîné à ce genre de gymnastique du visage imposée par ses fonctions commerciales.

Vous avez raison d’être fier du Seigneur Intendant Aectelion Premier, d’après les échos qui se sont propagés jusqu’en ma cité de Catrisis, il a montré à tout le peuple de Retrahant la vaillance des chevaliers kandrasiens.

Oui, je viens du Royaume de l’Elbre mais, Gaëd m’en préserve, je suis héosien et je ne suis pas comme ces … Il regarda en direction des empersois et ne termina pas sa phrase. Plus précisément, je suis du Delta, votre jeune prince servant semble apprécier cette région du Beilan.

Vous m’interrogez sur les relations entre Dame Enimia et votre Prince servant. Il est vrai que des rumeurs courent dans l’îlot de la Perfidie les concernant.

Il ne voulut pas approfondir le sujet car il ne savait pas qui était ce soldat. C’est pourquoi, il décida de le sonder avant de se confier à lui sur ce sujet épineux.

Pourquoi cette question ? Que pense les kandrasiens des liens affectueux qui semblent les unir ?

Un homme était assi au fond de la salle a une table, seul. Il buvait une bierre qu'il trouvait apparemment indigeste. Chaque fois que sa chope touchait ses lèvres, il tirait une grimasse à en traumatiser les plus jeunes. Il était vêtu d'une cape grise, et de bottes. Il portait à ses côtés une grande épée parée d'une toute petite pierre qu'il n'arrêtait pas de toucher comme a l'affût d'un danger.

Cet homme était un chevalier errant et un fidèle ami du seigneur Yents de Ciran. Personne ne connaissait ses origines, ni son nom. Tous l'appelaient "Le Pourfendeur".Ce surnom lui venait de sa réputation de guerrier aguerri. Cependant, personne ne l'avait jamais vue ce battre. Mais de par sa démarche et sa froideur, personne n'aurait remis en cause sa renommé de combattant.

Il se disait qu'il était déjà rentrait dans pas mal d'auberge, mais L'auberge de la This Caraïne avait quelque chose de plus que les autres auberges de par son ambiance extraordinaire, mais l'homme trouvait sa malsains.

En fin de soirée lorsque les tonneaux de bierres étaient bien entamés, trois soldats Orcumiens rentrèrent dans l'auberge, les gens étaient étonnés de voir des soldats Orcumiens dans la région. A en déduire de leurs expressions ces soldats étaient en permission. A leur entrée dans la salle, Le Pourfendeur sera très fort le pourpoint de son épée et regarda les soldats d'un air qui paraissait empli de haine mais aussi de méfiance.

Un vieillard était assis une table adjacente à celle du chevalier errant, il parlait à son ami paysan des joutes qui s'étaient déroulé la veille. De par son nez et son haleine, on pouvait voir que l'homme n'en était pas a sa première chope.
A l'entrée des trois soldats, le vieillard se tourna vers le chevalier.

- T'crispe pas comme sa mon coco ! Ceux la sont v'nu en paix !

Puis le vieillard fini sa chope.

Le Pourfendeur détourna le regard des trois soldats, se leva et partis en direction d'une table a l'autre bout de l'auberge qui devait être la seul table libre. Pour si rendre, il décriva un tracer bizar qui n'avait pour seul but que de passer le plus loin possible de la table des Orcumiens.

Personne ne sut jamais quelle était l'origine de haine que portait le chevalier envers les Orcumiens.

Le jeune soldat kandrasien continuait de se masser la main en masquant de temps en temps des grimaces sous les quolibets de ses partenaires qui riaient de lui quelques tables plus loin. Ce n'était vraiment aps sa journée ; de corvée de patates le matin, de corvées de haricots l'après-midi et maintenant devoir supporter ces ivrognes ! Son honneur le poussait à réagir aussi il empoigna son courage à deux mains et la carafe avec ce qui lui restait de membres pour balancer son contenu sur les kandrasiens supporters de l'intendant Aectelion Premier.

Un grand sourire aux lèvres devant les hurlements de dépit et de joie des infortunés hommes d'armes, il dévisagea son interlocuteur étranger : des habits assez colorés ornementés de broderies, perles et rubans comme il sied à un héosien et plutôt bouffants qui tranchaient nettement avec la terne tenue de l'homme d'armes kandrasien ; ce dernier portait une cotte de mailles sur une tunique couleur d'Erus dont le rouge passé traduisait l'ancienneté et donc la pauvreté de ce jeune homme qui, du haut de ses vingt printemps, avait probablement dû reprendre la garde robe d'un grand frère mort au combat contre les disciples de Thane lors des Sombres Nuits.

" On chuchotte que la cour de l'intendant voit d'un mauvais oeil ce "rapprochement" avec une beilanaise ne faisant même pas partie d'une famille noble ou régnante ; pour tout vous dire certaines jeunes dames de nos grandes familles seraient assez jalouses de voir cette jeune et bel' proie toujours fourée dans vot' delta sauf vot' respect. Al risa misertio ad anhilaê octeo'alros* m'a même hurlé l'autre jour ma cousine qui est secrètement amoureuse de son visage comme toutes les jeunes filles à Elderine. Je ne vois vraiment aps pourquoi ; je suis plus beau que lui non ? "

Il se leva en tournant sur lui-même se qui se révéla comme la dernière des stupidités, devenant ainsi la cible de tous ses compagnons qui lui balancèrent leurs plats en pleine poire le forçant à se réfugier derrière sa chaise.

*La femme étrangère abîmera/ait notre prince.

Tout en écoutant le jeune soldat kandrasien, Svold Kastriz observait la taverne. Il vit entrer les trois soldats orcumiens. Les héosiens avaient, il y a de nombreuses années, peuplé le désert d’Orcum, mais il apparaissait que les héosiens du Royaume de l’Elbre n’avait plus rien à voir avec les orcumiens. Pourtant, il fallait qu’il garde cela en mémoire, il pourrait tirer profit de ces origines communes pour développer le commerce avec ce territoire.
Il remarqua cet étrange Seigneur qui semblait être d’origine du Ciran et qui semblait, de par son comportement, éprouver une certaine animosité envers le peuple du désert. Décidément, Elderine était cosmopolite, bien plus qu’Ephyne où il s’était rendu pour régler une sombre affaire qui avait abouti au décès de Raphëlk Sidh.
Soudain, il reçut sur ces vêtements des morceaux de nourriture ce qui le fait pester. Les pitreries des soldats kandrasiens commençaient à l’irriter. Son interlocuteur, lui au moins, ne semblait pas penser qu’à s’enivrer. Mais, il était surtout poussé à lui répondre par la curiosité de prendre connaissance du sentiment kandrasien sur la relation entre Enimia et le Prince Servant.

Je pense qu’il est naturel que toutes les jeunes femmes kandrasiennes soient amoureuses de leur Prince Servant. Par contre, vous m’alarmez lorsque vous me dites que la cour de l’intendant voit d’un mauvais œil les relations entre ma maîtresse et votre prince. J'aimerais des précisions. Sachez, par ailleurs, qu’Enimia a le titre de Baronne depuis la disparition de son grand frère Patresis. Les Sidhs appartenaient à la petite noblesse du Royaume de l’Elbre, mais sous le règne du Roy Drehëran, ils ont accédé à un plus haut rang dans la noblesse du Beilan. Enfin, je pense que vous n’en avez cure.

En tout cas, les pucelles de Kandrasie ont de quoi s’inquiéter car il me semble que les relations entre la Baronne Enimia Sidh et le Prince Servant Aectelion vont se concrétiser et donc s’officialiser, si j’en crois les rumeurs propagées sur l’îlot de la Perfidie.

Un silence subit tomba sur la taverne, un soldat kandrasien dont l'âge pouvait être évalué aux alentours de trente ans se tenait face au colosse empersois levant la tête pour pouvoir fixer ses yeux dans les siens il ne cila pas quand ce dernier posa ses mains sur ses épaules, le souleva littéralement sous les yeux ébahis de l'assemblée retenant son souffle :

- Petit empersois t'es pas un homme si tu m'affrontes pas au pied d'Ademine

Le colosse le reposa sur le sol et les deux se dirigèrent vers une table pour relever le défi sous les vivats de leurs compagnons soudain réveilés de leur torpeur. L'ensemble de la taverne semblait intéressée par l'affrontement entre le petit kandrasien et le géant empersois ; l'histoire se répèterait-elle encore ? Orcumiens, ciranais et gérant avaient les yeux fixés sur cet évènements de la soirée mais en tous les cas il ne semblait guère intéresser Svold Kastriz et le jeune soldat kandrasien qui d'étaient approchés l'un de l'autre dans la pénombre de la salle pour échange leurs opinions sur le sujet brûlant de la relation potentielle entre le Prince Servant et la douce Enimia :

"Voyez vous les rumeurs que m'a rapporté ma cousine servante à la cour disent que les traditionnalistes de Kandrasie soutiennent qu'une alliance avec l'étranger n'est jamais bonne ; la cour de Beila et celle d'Elderine ont toujours eu une certaine rivalité bien que celle d'Elderine soit beaucoup plus rayonnante en Retrahant.

Mais parlez moi de ces rumeurs, ici l'on ne parle que de leur promenade dans les jardins du palais du Mont Quel'Tan voici quelques temps...

L'auberge etait au meilleur de son activité quand le signeur Tirn s'approcha de l'auberge , il avait depuis sa sortie de la joute , parcouru la capitale , s'arretant pour quelques achats dont une potion de rhume ,censée calmer sa toux

Svold Kastriss fut intrigué par l’emblème qu’arborait le chevalier kandrasien qui venait de pénétrer dans la taverne. Il aurait mieux fait de parler avec lui, plutôt que de perdre son temps avec le jeune soldat qui, décidément ne lui apprenait rien. Néanmoins, il décida de révéler au jeune soldat ce qu’il savait, lui qui occupait un poste important dans l’îlot de la Perfidie. Ce poste d’attaché commercial et de diplomate ne lui permettait pas de fréquenter les tavernes au Beilan et de parler avec le peuple. Il trouvait amusant d’être à l’origine d’une rumeur qui allait se propager comme une traînée de poudre parmi le peuple kandrasien.

La rumeur est très simple, il se dit qu’une cérémonie dans votre cité va consacrer l’amour de la Baronne Enimia et du Prince Servant Aectelion.

Vous parlez d’alliance avec l’étranger mais sachez que, même si les deux tourtereaux se mariaient, je ne pense pas que le mariage scellerait une alliance entre le Royaume de l’Elbre et la Kandrasie. Tout au plus, un rapprochement entre une région du Beilan, le Delta, et la puissante Kandrasie. Non, il ne faut pas voir des manœuvres politiques où il n’y en a pas.

Les perfidiens auraient préféré que leur Dame s’unisse à un Noble du Royaume de l’Elbre, tel qu’un proche du Roy, ou alors, au moins à un Seigneur du Ciran. Mais, le cœur semble guider les actes d’Enimia et elle n’a qu’une hâte, celle d’épouser votre Prince Servant. Je n’apprécie d’ailleurs pas ce dénouement. Qu’elle batifole avec qui elle veut mais qu’elle fasse un mariage qui serve nos intérêts, car dans le cas présent, j’ai du mal à voir comment cette union va favoriser la seule chose qui compte à mes yeux, le développement commercial du Delta et plus précisément de l’îlot de mes ancêtres. Je crains également que le Roy Drehëran n’apprécie pas cette union et que cela retarde l’accession d’Enimia à un titre de noblesse tel que celui de Comtesse qui assoirait son emprise sur le Delta.

Mon seul réconfort est que votre Prince Servant devrait régner sur Elderine à la mort de son oncle. Et, à mon avis, Elderine est destinée à devenir le centre commercial, diplomatique et cuturel du Retrahant. Ephyne perd de son importance en comparaison de la capitale kandrasienne. Le rayonnement d’Ephyne a fait son temps et celui d’Elderine est grandissant. Si mes prédictions se révèlent exact, alors peut-être que l'officialisation de l’union entre la Baronne et le Prince Servant sera utile à notre commerce.

Le jeune soldat éclata de rire et donna un coup de la main amical dans le dos de Svold Kastriss visiblement étonné de la hardidesse de son interlocuteur à comparer la puissance de la Kandrasie à celle du Delta certes en pleine expansion mais encore loin de représenter l'intégralité du Beilan.

Il jeta un bref coup d'oeil vers le duel qui n'en finissait pas entre le colosse empersois et le soldat kandrasien et hurla un cri d'encouragement vers son compagnon tentant tant bien que mal de couvrir les bruits de la taverne.

"Nous en sommes là ? Un mariage, ici, à Elderine ? créfieu vous parviendriez presque à m'étonner étranger ; quand ma cousine apprendra ça....

Mais quelle expansion il aura ? Avec les joutes nous sommes prêts à accueillir beaucoup de monde, pensez vous que nous verrons un maintien de l'affluence actuelle de visiteurs étrangers à Elderine ? La majorité des seigneurs de Retrahant hébergent dans nos auberges, tavernes voire au palais pour les invités d'honneur de notre intendant depuis déjà quelques temps et ils y ont pris leurs aises ; de nombreuses rencontres importantes entre territoires ont désormais lieues dans les murs de la cité blanche et il serait dommage de ne pas donner à ces fêtes l'ampleur qu'elles méritent."

Le perfidien fut plus qu’étonné de la réaction du jeune soldat kandrasien. Il trouva le coup de main dans le dos un peu trop familier, et pensa que cela lui apprendra à aller traîné dans les tavernes. Par contre, qu’avait-il dit de si hilarant ? Est ce le fait d’avoir comparé Elderine à Ephyne ? Son idée était-elle si saugrenue ?

Mon jeune ami, qu’est ce qui vous fait rire de cette sorte ? Lesquelles de mes paroles ont provoqué ses éclats de rire ?

Quant à vos questions sur l’organisation de cette cérémonie et l’ampleur qu’elle prendra, je pense que seules les instances dirigeantes de Kandrasie pourraient y répondre. Même, Dame Enimia, à mon avis, n’a pas les réponses à vos interrogations.

Le jeune soldat rougit brièvement de l'impair diplomatique qu'il ferait en expliquant son éclat de rire et préféra plaider l'alcool embrumant son esprit ce qui est pourtant ridicule chez un kandrasien restant généralement maître de son esprit et de son corps malgré une légère frivolité lors de l'abus de boissons diverses.

Ainsi une cérémonie de mariage princier aurait prochainement lieue en Kandrasie ; voilà qui ajouterait du piquant aux relations avec les autres territoires et permettrait de réveiller quelque peu la torpeur dans laquelle se trouvait plongé Retrahant depuis la fin des joutes d'Elderine.
Le combat du pied d'Ademine s'étant finalement terminé par la victoire du kandrasien sur l'empersois le jeune soldat se précipita pour le fécilicter avant de revenir un pichet bière plein à la main :

"Excusez étranger, le devoir avant tout. je vous laisse cette compagnie en désignant le pichet et je m'impatiente désormais de ces cérémonies s'il s'avère que vous ayez raison."

Il sortit bras dessus bras dessous en compagnie de ses camarades.