Où l'on négocie un Grand Tiram.

Il était une fois un Grand Tiram qui avait trop crié dans une fête donnée par un prince kandrasien. Il avait haussé le ton contre des notables de la suite kandrasienne et fini par être emprisonné dans les cachots d'Elderine. Ce Tiram portait le nom de Rewal Rem'Orcum et se morfondait dans une chambre entourée de barreaux et de gardes. Ainsi était-il, oublié et seul dans sa cage d'or.
Cependant, il y a peu, certains Fironkois, que l'on sait amis des Kandrasiens, s'intéressèrent à lui et proposèrent au Régent Alanor de l'en débarasser si jamais eux-mêmes arrivaient à s'en délester dans quelque autre échange.

Ainsi donc, les Fironkois envoyèrent une délégation regroupant une centaine d'hommes d'armes à Radadjathaïadah, la capitale du Siâle et siège du Grand Tiram entravé.
Arrivés dans la capitale, les émissaires se dirigèrent directement vers le palais qui surplombait la ville et réclamèrent une audience aux représentants de la cité en l'absence du Tiram, expliquant qu'ils étaient là pour négocier la rançon de leur maître.

Ainsi donc on renvoya sans explication la délégation des sauvages qui, d'ailleurs, plongés dans une incompréhension qu'ils ne toléraient pas, s'en allèrent à grands renforts de coups de poings et de plats d'épée.
Une fois revenus aux frontières entre Orcum et la Kandrasie, ils contournèrent les sbires orcumiens et s'en retournèrent à Radadjathaïadah une dernière fois. Arrivés devant les portes du palais, ils demandèrent à nouveau audience, gentils qu'ils étaient.

Ce fut le représentant de l'Akathaïadah du nom d'Aion Catzmei qui se renda à l'encontre des fironkois avant qu'ils n'entrent dans Radadjathaïadah. Ce viel rem'Yshme issu d'une des plus vieilles familles de Takkel-Yshma, venait d'écarter les siâliens voulant égorger les fironkois venus aux portes de la capitale du Siâle à nouveau.

Noble fironfois,

Je ne suis pas au courant de la présence du Grand Tiram, en ces lieux. Vous pensez bien que le grand Tiram se présente uniquement lorsque l'Akathaïadah se déplace personnellement et n'a pas d'audience à accorder à un homme comme moi ou comme vous.

Cependant, j'ai été informé de ce qui se tramait. Voyez vous la situation est très délicate. Soit le Grand Tiram réside derrière ces murailles et vous détenez un homme insiginfiant que les kandrasiens vous ont revendu. D'ailleurs, cette hypothèse n'est pas absurde sachant que dans l'histoire de Retrahant, les karéens ont eu peu de considérations à votre égard, vous avez été longtemps allié à ceux des marais...

Soit vous détenez réellement le Grand Tiram et dans ce cas, vous vous dirigez vers une guerre avec les siâiens. A ce propos, j'ignorez que les fironkois se lançaient dans le marché d'esclave. Est ce le culte du feu qui vous transforme ainsi?

Goron, l'émissaire envoyé par les Fironkois, se tourna vers le vieillard qui lui adressait ses doutes et ses salutations. Il passa une main sur son crâne entièrement rasé, un peu gêné de voir autant d'Akra devant les portes du palais orcumien. Inspirant une grande bouffée de l'air chaud et sec qui régnait dans la ville, il dit, après s'être légèrement - très légèrement - incliné.

Noble Rem'yshme, l'affaire ne demande aucune délicatesse ni même doigté. Les Kandrasiens, amis de nos maîtres, ont cru bon de mettre dans l'affaire les Fironkois. Ainsi, nous venons ici pour négocier la libération du Grand Tiram Rewal en tant que tiers. Nous sommes, disons, une sorte d'arbitres impartiaux, venus pour régler le litige dans la paix. (Il ne semblait pas peu fier de ses prérogatives au vu de la façon dont il avait de faire admirer à tous sa gorge et les paupières de ses yeux fermés.)

Sieur, les Salamandres n'ont rien contre l'esclavage. Il existe des êtres supérieurs aux autres, et cela est justice que les êtres à la destinée supérieure soient servis par des hommes plus faibles. Toutefois, le Grand Tiram n'a rien de ses êtres inférieurs que l'on qualifie d'esclaves, il est votre gardien et pour cela un homme libre honorable - généralement. Enfin, le gardien des Siâliens.

Enfin, sauf votre honneur, mais vos histoires datent d'un autre temps. Les Karéens nous honorent comme l'on honore un ami, tandis que les Graméens, cette vermine infâme, ont asservi notre race pendant des décennies de domination, jusqu'à ce que les vrais Fironkois prennent la place qu'il leur était dû.

La situation était réellement embarsassante pour Aion Catzmei, il n'avait pas toutes les données en main. Mais, les ordres de l'Akathaïadah concernant ce problème était clair. Il fit un signe à des hommes en arme Rem'Yshmes en surnombre par rapport aux fironkois qui s'approchèrent des archers restant en retrait. Aion emmena par le bras celui qui s'adressait à lui aux abords de Radadjathaïadah.

Voyez vous noble fironkois, si jamais votre commandeur, n'est ce pas ainsi que vous nommez le chef de vos cités à Fironk, essayez de marchander un hypothétique Grand Tiram avec les Sialiens cela mériterait la mort, enfin du moins dans notre culture.

Voyant les archers Rem'Yshmes tendre leur arc, les fironkois se précipitèrent sur eux. Des épéistes armés de Yatagan firent front, la volée de flèche s'abattant sur les fironkois les moins prompts à réagir. Le combat fut violent, des combattants périrent des deux cotés et ce ne fut que grâce à leur surnombre que les Rem'Yshmes vainquirent.

Plusieurs fironkois crièrent en mourrant :

"Pour Faörlihg ! Pour Garwän l'homme qui nous a recueillis et fait de nous des hommes honorables et forts !"

Juste avant le début des hostilités, Aion Catzmei eut un soupir et au même momment Goron sentit la pointe d'une dague pénétrait sa chair.

Voyez vous le désert n'est pas sécurisé malgré les efforts des Siâliens, ils vous ont accompagné à la frontière et quelques brigands, il serait injuste d'accuser les diospyrs, vont tuer les hommes qui vous ont accompagnés.

Goron asséna un coup à Aion Catzmei que celui çi ne put éviter avant de sombrer dans un sommeil profond.

Une missive fut envoyé au Commandeur Garwan

Citation :

Commandeur,

J'ai recueuilli dans ma cité Takkel-Yshma, la perle de l'océan, un homme du nom de Goron qui disait avoir été envoyé en votre nom, enfin, avant que nous fumes obligé d'amputer sa langue. Il parlait du Grand Tiram du Siâle et d'une mission le concernant. Il semble avoir été victime lui et les hommes qui l'accompagnaient de brigands. Je me suis renseigné auprès des diospyrs, il semblerait qu'ils ne soeint pas en cause. L'agresseur qui l'a amputé des quatres membres semblait invoquer Gaed à chaque fois que la scie entamait un de ses os. Il est possible que les responsables appatiennent à une de ses sectes qui veulent répandre le gaedisme dans notre désert. L'amputation pour purifier pourrait correspondre à leur façon d'agir.

Avant, que mes médecins siâliens soient obligés de lui couper la langue pour éviter une mort certaine due à la deshydratation, il a dit que les fironkois étaient liés aux kandrasiens. je fus surpris par cette remarque, vous saurez sans doute m'éclairez...

Enfin, Goron est prêt à rejoindre votre cité bien que je craigne qu'il est besoin d'aide pour rompre l'immobilité. J'avoue être ignorant s'il est apte à suivre votre nouveau culte.

Cordialement,

Waldzrit de Narc
Akathaïadah de la Souhnak

A nouveau, Garwän le Brun envoya une nouvelle délégation de diplomates. La troupe était identique à la première. Les hommes avaient une mine sévère, les soldats portaient de légères armures de cuir tanné que l'on ne connaissait pas aux armées fironkoises et les chefs de la compagnie étaient vêtus de toges blanches de bonne coupe. Tous avaient le crâne rasé et le visage glabre.Tous étaient armés.
A nouveau, on arriva à Radadjathaïadah et on manda une audience aux autorités dirigeant le Siâle en l'absence du Grand Tiram.

Abu, Oblath de la Nation du Siâle avait reçu les pleins pouvoirs de la part de ses pairs, ou du moins, avait pris ce pouvoir et officiait donc en sa qualité de Grand Tiram par intérim. Droit et Loyal, il avait pour unique objectif de récupèrer Rewald, mais...

" Qu'est-ce donc que tout ce vacarme ! On m'a parlé de quelques blancs-becs qui désirent voir le chef, faites-les venir dans la salle du trône, je les y attends et sommez les Rem'Yshmes présents à la cour de venir eux aussi, ils me seront un bon appui. "

Pénétrant dans la vaste salle du trône où traînaient encore les cadeaux des beilanais, Abu s'installa sur un siège en bout de table, alors que le trône du Grand Tiram était mis à l'écart, déplacé par une dizaine de bras. Une fois que tout fut prêt, il fit sommer un garde et lui donna ses ordres.

" Trouve les barbares et fais-les venir ici, désarmés cela va de soit. Je veux parler qu'aux chefs, envoie les autres dans les écuries qu'ils s'occupent de leurs montures, si encore ils en ont. "

Ainsi, avec ce zèle qui semblait caractériser les nouvelles relations entre Fironk et le Siâle, on vint s'occuper des Fironkois. Les gardes du palais voulurent les désarmer, mais tous s'en gardèrent bien, et peu à peu, la conversation glissa vers les échauffourées et les rixes. Sans la tempérance et l'exemple des quelques diplomates, la situation aurait tourné au pugilat. Les chefs de la délégation ôtèrent leur ceinture et suivirent les gardes, tandis que les guerriers de la délégation, un peu calmés mais excités par les chamaillis, regardaient leurs maîtres s'en aller, la main sur le pommeau de leur épée toujours ceinte.

Une fois qu'on les eut mené à celui qui remplaçait le grand Tiram, les représentants de Garwän inclinèrent légèrement la tête et l'un d'entre eux (celui qui paraissait avoir le visage le plus émacié et le plus dur) salua le maître des lieux et se présenta sous le nom d'Azghran dans un orcumien laborieux.

Aion Catzmei était assis à droite d'Abu. Deux autres Rem'Yshmes des cités d'Yshlé Lohas et Gartak siégeaient à ses cotés. Des hommes en arme de la Souhnak étaient également présents au coté des siâliens.

Le représentant de l'Akathaïadah regardait avec mépris les barbares qui venaient de pénétrer dans la salle du trône. Le fironkois avait eu le toupet de renvoyer une délégation. Il regrettait que ses hommes n'aient pu être interceptés et massacrés mais le désert d'Orcum était si vaste... Parfois, ses yeux les quittaient du regard pour observer un homme vêtu de noir qui se tenait debout dans la pénombre d'un coin de la salle.

Abu était un homme de Guerre plus que de parole. Il n'avait guère l'habitude des palabres et préférait de loin l'action des guerres avec les diospyrs errant non loin de la Capitale, mais voyant que le fironkois, bien que voulant lui faciliter la tâche en parlant orcumien, n'arrivait à pas grand chose, il se mit à parler empersois.

" Azghran, soyez le bienvenu à Orcum. Je n'ai pas de temps à perdre, je vous écoute donc ! "

Un peu surpris par les paroles du dirigeant, le diplomate ne s'en offusqua pas. Il comprit enfin pourquoi les soldats avaient fait montre d'une telle rudesse. S'inclinant légèrement à nouveau, il énonça les volontés de son maître de façon lapidaire.

"Le Commandant des Fironkois de Yawni détient le Grand Tiram Rewal par le truchement de tractations avec les Kandrasiens et veut savoir contre quoi vous êtes prêts à l'échanger."

Voilà donc que ces barbares ne valaient pas mieux que les diospyrs. Abu avait appris à les apprivoiser et pensant comprendre tout de suite le mode de fonctionnement de l'émissaire, enchaîna donc.

" Que pensez-vous que nous pourrions offrir à Fironk ? Il n'est pas là question d'un échange mais d'une rançon, car tels sont les mots. Dites-moi donc ce que vous voulez que l'on vous donne, cela nous évitera de perdre du temps. "

Irrité et peu habitué à des tractations aussi immédiates et crues, l'émissaire s'échauffa et laissa échapper ses pensées.

"Mon maître veut l'obre rouge. En échange, ce sera votre Tiram."

Abu fut à moitié surpris. Il était vrai que le joyaux des joyaux était convoité par beaucoup de monde, mais il ne pensait pas que les étrangers s'intéresseraient à la pierre. Dire que le Grand Tiram portait l'Orbe Rouge constamment sur lui, ou presque. Affichant une mine des plus attristés, il répondit.

" Mais l'Orbe Rouge n'est qu'un mythe ! Je vous convie bien évidemment à le rechercher, si cela peut vous combler, mais je ne vois pas ce qu'il pourrait vous apporter. "

Encore plus excédé, l'émissaire eut un mouvement de colère. Se reprenant, il inspira un moment, attendit que l'agacement s'éteigne et reprit.

"Mythe ou pas, c'est la volonté de mon maître. A vous d'honorer l'échange. Si jamais l'Orbe n'était plus en votre possession, je vous convierai vous aussi à la retrouver. Il est, semble-t-il, ce que mon maître veut."

L'Oblath avait bien compris que l'émissaire fironkois ne s'attendait pas à une telle réponse. Bien évidemment, il ne connaissait pas non plus l'histoire d'Orcum, ce qui était tout à son avantage.

" Fironkois, je ne crois pas que vous ayez bien saisi mes propos. L'Orbe Rouge est un mythe, jamais nous n'en avons vu la couleur depuis plus d'un millénaire. Pensez-vous donc à ses mystifications, à cette superstition ? Commenceriez-vous donc à considérer la religion ? "

Comme tout guerrier d'Orcum, il avait appris sur les autres peuples, un peu. Il se souvenait en particulier des alliés et des ennemis, de leur histoire et des contributions d'Orcum pour leur survie. La Kandrasie était la Reine des Traitresse et Fironk lui emboitait le pas.

" Du fait d'avoir le Grand Tiram en otage, vous Fironkois, pensez avoir l'ascendant sur le Siâle ? Car il est question de la Région Autonome du Siâle et non d'Orcum comme vous aimeriez que cela soit. "

Le ton s'était raffermit et les gardes cramponnèrent leurs armes. Abu était connu pour ses coups de sang qui finissaient généralement en bagarre. Il ne serait pas étonnant que les fironkois soient tués sur le champ pour une parole plus haute qu'une autre.

" Oubliez l'Orbe Rouge, nous ne pouvons pas l'avoir nous-même ! Demandez ce que vous voulez d'autre, nous pourrons y réfléchir ! "

Azgrhan ne comprenait pas, ne comprenait plus. Il avait respecté l'étiquette, avait parlé de Siâliens. Il avait fait en sorte de venir devant le chef de la capitale désarmé. Et le dit chef n'en eut cure. Il se contenta de nier les paroles de son Commandant et de railler. Les espions étaient pourtant clairs. L'orbe existait. L'orbe existait et était entre les mains des Orcumiens.
L'émissaire eut un nouvel accès de colère, qu'il réprima en griffant avec hargne son crâne nu.

"Cela n'est pas possible. Le Commandant Garwän va perdre patience. Cela n'est pas possible. J'espère que l'Orbe rouge sera retrouvée et qu'elle reverra la lumière du soleil bientôt, car mon maître en a assez de ce temps perdu. Il ne veut rien d'autre. Seule l'Orbe l'intéresse."

Aion Catzmei avait entendu parler de l'Orbe rouge, mythe ou réalité, par contre, il l'ignorait. Il ne pouvait s'empêcher de se demander l'intêret de perdre son temps à négocier avec les barbares. Le Siâlien désirait négocier, il respecta ce point de vue et se limita à poser une question.

Mon nom est Aion Catzmei, je suis le représentant de la Souhnak.

Permettez moi de vous posez une simple question : Quel est l'interet de votre commandeur pour cette pierre mythique?

Se tournant lentement vers le nouveau vis-à-vis, la figure de l'émissaire était placide et ses yeux étincelant d'un feu intérieur. Il psalmodia d'un air absent.

"Je ne connais pas les desseins de mon maître, mais j'entends son verbe et obéit à ses ordres."

Aion Catzmei haussa les épaules avant d'aller s'entretenir avec l'homme se tenant dans la pénombre. Ensuite, il reprit sa place et parla à voix basse à l'intention de l'Oblath d'Orcum et du Jadïadah. La langue de la Souhnak était l'orcumien, seul un patois déformant plusieurs mots orcumiens et enrichi de nombreux termes ayant trait essentiellement à la mer y était couramment pratiqué par les rem'yshmes. Aion Catzmei utilisa ce patois, facilement compréhensible par les siâliens, pour empêcher toutes compréhensions de ses propos par les fironkois tant bien même ils auraient tenté de lire sur ces lèvres.

Oblath Abu,

Il me semble que vous pourriez accepter cette échange. Soit vous avez entre vos mains le joyau vermeille, soit vous leur donnez un vulgaire rubis de taille conséquante qui fera illusion aux yeux de ses barbares. Voyez vous, il est moins dangereux de récupérer une pierre qu'un homme, enfin pour l'homme en question.

Vous savez que l'Akathaïadah tient à ce que le Grand Tiram Rewal Rem'Orcum revienne à Radadjathaïadah sain et sauf et puisse reprendre les rennes du Siâle. N'y voyez pas ombrage quant à votre rôle actuel...

Et puis, vous détenez l’épée sacrée de la lignée des Grands Tirams d’Orcum, n'est ce pas?