Les premiers messagers ne parvinrent au Mont Gris qu'à l'automne, plusieurs semaines déjà que la Blanche subissait les assauts de ses agresseurs sans faillir. La Marche et Karakas avaient failli dans leur rôle de défenseurs et plus rien e paraissait empêcher la réussite des félons. Erastan reçut la missive alors qu'il effectuait sa ronde quotidienne sur les murailles de la forteresse Eterd surplombant la ville fortifdiée d'Ilsta'Adiad. Il en fit rapidement un bout de chiffon et la lança par dessus les remparts, la laissant s'envoler, croisant de-ci de-là un étendard décroché des lances d'honneur des Hautes Tours. Elderine était loin, bien loin pour demander aux siens de tout abandonner et de mourir dans cette cause.
"Paladin, quels sont vos ordres ?
- Les directives sont pour le moment annulées, personne en Kandrasie n'a suffisament d'honneur ou ne mérite le respect des autres pour les faire appliquer.
- Vous n'êtes plus recenseur, Paladin d'Erus ?
- Je ne suis plus kandrasien, le royaume est mort suite à cette dernière infamie, celle qui voit un homme de foi vendre son âme pour boire celle de son régent.
- Et la Reine ?
- Elle nous a abandonnés. Elle retrouvera un Royaume abandonné.
- Et votre allégeance ?
- Allégeance à qui ou à quoi ? A nos valeurs ? Elles n'existent plus, à notre sang ? Il a failli, à notre Reine ? Voilà bien longtemps que ses fidèles sont morts et s'en servent de prétexte pour toujours plus de pouvoir et de guerres. Nous n'avons plus rien à défendre et plus rien qui ne mérite notre mort.
- Et le régent, quelle a été sa faute ?"
Erastan se pencha par dessus les créneaux en soupirant, il lâcha un cracha qui s'étala sur les rochers en contre-bas après s'être éparpillé dans le vent au passage. Voilà tout ce qu'il pouvait faire pour le régent aujourd'hui, cracher sur son allégeance. Les hommes d'Ilsta'Adiad étaient partis depuis plusieurs jours dans le désert, il en faudrait plus pour les rejoindre, autant pour les ramener. La Blanche devrait se passer de leurs services.
Non, il était temps pour la Kandrasie de laisser le flambeau à ses maux et de sombrer dans un âge sombre ou son régent ne serait soumis qu'à la loi graméenne. Gaed ? Ils arriveraient trop tard et étaient empêtrés dans leurs luttes internes. De plus quoi combattre, qui combattre ? Isvan et le patriarche, une alliance douteuse qui de toute manière aurait l'adhésion de quelques aveuglés. Gwalith et la Marche ? Des guerriers qui se croyaient toujours au temps des grandes croisades aevenspeer et adoraient les exploits de leurs pères, ils étaient dépassés par les évènements. La solidarité entre eux, le royaume et l'allégeance, voilà ce qu'il auait voulu défendre, voilà ce pour quoi il serait mort. Pas pour choisir un de ses frères comme maître et exécuter les autres en place publique.
"Fais savoir au Patriarche qu'Ilsta'Adiad ne répondra plus à ses ordres. Lorsque la kandrasie aura besoin de nous nous répondrons mais lorsque l'homme aura besoin de soumis il devra se tourner vers les barbares graméens. Ce n'est pas notre rôle de sombrer dans les plaines.
- Devrons nous craindre leur venue lorsque tout sera fini ? Eriomene ed Abe Sur ne sont pas si éloignés de leurs armées et nous ne ferions pas le poids, pas pour le moment.
- Dis-lui seulement que les Terres du Sud ne seront plus militarisés. Nous ne marcherons pas sur la Blanche ou sur la Kandrasie et nous n'accompagnerons pas les graméens en guerre. Nous n'aurons tout simplement pas d'armée.
- Alors que ferons-nous ?"
Il jeta un regard à l'agitation des mines en contre-bas, puis un autre vers les forges lointaines et enfin un dernier au désert qui entourait le Mont Gris, parsemé de quelques touches disparates autant d'oasis infestées de Thanéites.
"Des enfants et de la pierre, puisse Erus nous protéger."
Il rajouta quelques paroles pour lui-même :
"Et puisse-t'il se réveiller avant qu'il ne soit trop tard ou nous ne devrons compter que sur nous-mêmes."