LE MALHEUR, dit l'adage populaire, ne vient jamais seul. Difficile à dire, et très vague, ce proverbe. Un autre, plus spécifique et plus sûr dit que les Graméens eux non plus ne viennent jamais seuls.
Encore une fois, une troupe de quelques milliers d'hommes, deux mille, pour se montrer rigoureux, avait arpenté les terres du roi de Beila sans être inquiétées par les immenses armées des seigneurs de l'Elbre, désorganisées par les famines, les maladies et les désertions massives. Cette vague de catastrophes semblait se produire partout dans le monde, comme si de mauvais esprits étaient venus affaiblir les Hommes. Or les catastrophes sont toujours suivies par les charognards.
Peu nombreux, rapides et plus disciplinés que la plupart des troupes de routiers des marais, ces pillards avaient ravagé plusieurs bourgs sans défense ainsi que deux cités d'importance. L'une d'entre elle était dirigée et défendue par l'un des princes royaux de Beila, et les rumeurs couraient déjà sur le meurtre du malheureux protecteur, tombé sous le nombre des barbares qui, aussitôt la ville mise à sac, s'étaient volatilisé.