La Grande Peste Noire

Ce fut un évennement sans précédent dans les annales de toutes les cités de Retrahant . Nulle guerre, nulle famine n'a jamais causé autant de morts que ce fléau que fut... la Grande Peste Noire.


D'aucuns disent qu'elle s'en est venue du Val de Mort, où pourrissaient les cadavres de maintes batailles. D'autres évoquent la décadence d'une société où les Seigneurs passent plus de temps à la taverne qu'à prendre soin de leurs sujets. D'autres encore, parlent d'un étrange voyageur, un homme dôté d'étranges pouvoir venu de la mystérieuse cité de Combe, et qu'ils nomment le Mage Miz Ajour.

Quelle qu'en soit la vérité, je doute que personne ne la connaisse jamais vraiment. Mais l'importance ne porte pas tant sur l'origine de ce qui s'est passé que des faits eux-même...


_[HRP]___________
J'ai découpé mon récit en plusieurs parties pour en faciliter la lecture, donc merci de ne pas poster avant que je vous y autorise.

Cette année là, les hommes savants d'Ephyne avaient mis au point un nouveau type de semence pour le blé, semence qu'ils partagèrent avec tout Retrahant en moins d'une saison. Cette semence se voulait plus productive, et plus flexible dans sa gestion. Malheureusement, elles nécessitaient une attention plus grande, et les fermiers de Retrahant éprouvèrent grand mal à maîtriser ce nouveau savoir. Aussi, bien vite vint une grande instabilité : tout le monde étant au bord de la famine, et les caravanes de blé parcouraient Retrahant en tout sens.

Sur cette instabilité agricole, qui maintenait l'humanité au bord de la famine donc, nacquit une rumeur. D'abord un murmure venant des confins, d'où marchands et mercennaires ombosiens rapportaient des histoires de cités touchées par un grand fléau, puis, peu à peu, le murmure se fit chuchottement, et ce fut aux Empersois et autres Séquanes d'apporter leur pierre aux récits.

Jusqu'à la Semaine Sans Lune...

<- ~~~ ->

Jusqu'alors, nombre de Capitaine avaient rapporté soldats malades dans leurs rangs, surtout des mercenaires qui revenaient des confins : les hommes commençaient à développer de fortes fièvres en grand nombre, et la plupart ne pouvaient guère se lever de leurs couchettes. Mais les Généraux et Seigneurs n'y prétèrent guère attention, car ils considéraient cela comme chose normale et passagère dans toute armée.

Ce leur fut un tort.

Après l'épidémie, il se révèla que la majorité des premiers soldats infectés étaient des mercenaires empersois - et non des pauvres issus des minorités Séquanes disséminées dans tout Retrahant, comme l'avait annoncé/accusé le Sire Perceval au début de l'pidémie -, qui venaient de livrer bataille dans les royaumes éloignés et s'en revenaient en leur foyer d'Ephyne.

L'Emperiste était en effet devenue une terre surpeuplée depuis quelques années, et c'était le plus souvent dans une situation plus que précaire et insalubre que s'installaient les nouveaux immigrants. C'est dans ce véritable bouillon humain qu'apparurent les premiers cas de Peste.

Les mercenaires étant fort demandés en cette époque tumultueuse, et les conditions sanitaires des autres royaumes de Retrahant guère plus brillantes que celles de l'Emperiste, il ne fallut pas plus d'une semaine au fléau pour atteindre la totalité des grands centres d'échange. C'est cette période courte mais fatale que l'on appelle désormais Semaine Sans Lune, car durant toute cette période de sombres nuages masquèrent la vue de la Lune, pourtant pleine, toutes les nuits.

Les Seigneurs ordonnèrent alors pour la plupart l'isolation de leurs cités (certains ne le firent cependant pas), mais trop tard : il fallut moins d'une saison pour que tous les royaumes connus fussent infectés...

Peu de gens avaient déjà connu pareille épidémie - et je prie pour que peu aient à la connaitre de nouveau à l'avenir -, aussi personne ne sut réellement de quelle manière réagir face à ce fléau, d'autant que les premiers symptomes n'étaient que peu alarmants.

<- ~~~ ->

D'abord une forte fièvre, comme il en est de commun partout, accompagnée d'une forte toux. Puis, rapidement des bubons noirs et suintants de pus poussaient sous les aisselles et sur l'aine des malades. Les médecins, Gead les protège !, tentaient de sauver les malades en perçants ces bubons avec des tisoniers chauffés a blanc afin de faire sortir le pus et de cautériser la plaie en même temps. Mais en général, ça ne faisait qu'affaiblir plus les malades, qui mourraient rapidement.

Avant la mort les bubons atteignaient des tailles énormes (gros comme un bonne pomme ou une orange), et le patient crachait ses poumons. La particularité de la Grande Peste Noire, outre les bubons, était que les entrailles des malheureux se liquéfiaient devenant pâteuses, collantes...

La mort survenait de 3 à 6 jours après la contagion.

<- ~~~ ->

Face à cette horreur, la superstition prévalait sur le bon sens : on brûlait diverses plantes, notamment le laurier, ou on en faisait des huiles et des onguent, ou encore des infusions dans lesquelles on trempait des foulards que l'on se mettait sur le nez pour se protéger des miasmes.

Quoi qu'il en soit, alors que les malades auraient dû être isolés dès l'annonce des premiers symptomes, et notamment des bubons, on tenta de les "guérir", ce qui fut, là encore, une grave erreur. Car les "médecins" étaient le plus souvent les soigneurs des corps armés (hors des villes) et les moines (dont les monastères servaient de refuge, ou plutôt, de mourroir), qui avaient grands contacts avec de nombreuses personnes, ce qui eut donc pour effet de propager l'épidémie plus que de l'endiguer, la transformant, lentement mais sûrement, en véritable pandémie...

Dans les rues, les cadavres donnaient de plus en plus de travail aux Charretiers Macabres, qui ne se souciaient désormais plus de vérifier si les malheureux qu'on leur livrait étaient déjà, ou pas encore morts. D'une manière ou d'une autre, s'il n'avaient pas encore trépassé, il n'auraient guère tardé à le faire. Et tandis que leurs corps étaient entassé comme de la viande avariée dans les charettes, leurs maisons étaient marqueès de grandes croix rouges ou, quand il n'y avait aucun risque pour les habitations voisines, brûlées.

<- ~~~ ->

Les rouages de la machine maudite étaient en route, et les cités reprirent bien vite quelque macabre activité : les infectés encore en état de faire quelque effort évacuant chaque jour des dizaines, voire des centaines de corps putréfiés hors des murs (quand la cité s'était isolée, les corps étaient jetés des murailles, puis recouverts de chaux ; pour les autres, de grands bûchers étaient allumés aux entrées des villes), les moines et les prêtres traitaient de plus en plus de cas dans leurs sanctuaires, et les cités ressemblant de plus en plus à de vastes champs de croix rouges, car il était rare que les familles ne soient pas décimées dans leur intégrité.

Et partout, pendant que la panique et l'effroi s'installaient, la gestion agricole des nouvelles semences n'était toujours pas au point, et les rats pullulaient dans les immondices qui n'étaient point ou plus évacuées et dévoraient les maigres et précieux stocks de blé. Il n'était d'ailleurs pas rare de voir les habitants s'en prendre de leur mains aux rats destructeurs, perdant souvent un ou plusieurs doigts dans l'affrontement.

Mais d'autres affrontements se menaient dans les campagnes de Retrahant : à la famine grandissante s'ajoutaient bien tôt les rapines car, les armées étant les plus touchées (un tiers des effectifs périrent en une saison), il devenait très difficile aux généraux de maintenir la cohésion dans leurs rangs. Quand le chaos s'installait, les désertions se multipliaient, les hommes en armes désormais libres, et souvent infectés, parcourant Retrahant à la recherche d'une maigre pitance, répendant toujours plus de désolation, par la lame ou le miasme. Quand au contraire les généraux réussissaient par miracle à maintenir leurs soldats sous leurs ordres, ils n'eurent d'autres desseins que de s'en prendre "au nom de leur Seigneur", à des villes plus qu'affaiblies par la calamité.

De nombreux mois plus tard, c'étaient désormais d'immenses bûchers fumants qui s'élevaient devant chaque muraille de Retrahant, bûchers où s'entassaient maints cadavres qui ne semblaient vouloir cesser de s'accumuler. La population était aux abois : il y avait trop longtemps qu'elle subissait cela, elle n'en pouvait plus.

Mais alors que les peuples allaient baisser les bras, le fléau se montra de moins en moins cruel, comme le feu qui se meurt faute de bûche à brûler.

Et, peu à peu, les bûchers s'éteignirent.

Il ne restait alors plus grand chose, mais les survivants sûrent s'organiser : combattant les rats, nettoyant les cités, ensevelissant les morts, replantant les champs, mattant les pillards, et brûlant la gorge serrées tout ce qui avait été au contact des êtres aimés et perdus ; tout, jusqu'à leurs foyers, jusqu'aux moindres souvenirs.

<- ~~~ ->

Et la vie revint en Retrahant : les cités se rouvrirent au monde extérieur, les contacts reprirent, puis le commerce... et les guerres - qui en réalité n'avaient jamais cessé, mais bon -.

Mais plus jamais le chant des crécelles* ne retentit...



_[HRP]___________
*Les pestiférés devaient s'annoncer lorsqu'ils approchaient d'une ville. Pour cela, ils faisaient tourner un instrument, la crécelle, dont le bruit de lamelle de bois contre le bois s'entendait à des kilomètres...
_________________
Voilà, j'ai finit, bon postage.