Un départ précipité

Dertil aimait ces moments, un feu ronflant dans l'âtre, un ménestrel répétant des batailles épiques dont les moults détails plaisaient toujours autant à l'Intendant. Il vivait la bataille, s'identifiait aux héros. On raconte d'ailleurs qu'il était régulièrement en sueur après la lecture de ces récits.
Autant dire que lorsqu'on vint l'avertir qu'un messager avait une missive importante à lui transmettre, il ne renonca pas de bon coeur à l'écoute du troubadour.
Lorsque son clerc lui lut la copie du message que le Sire Quentin avait reçu, il entra dans une rage folle.

Il menacait lui même certains seigneurs Empersois, c'était la coutume entre suzerain et vassal, mais il n'appréciait pas que quelqu'un d'autre le fasse. C'est pourquoi il fit envoyer une missive à Dame Enimia, pour la prévenir que la punition serait immédiate.

La saison était déja bien avancée, et le départ ne pourrait donc se faire qu'au début de l'été, au moment où les hommes auraient du être aux moissons. La conscription fut donc forcée, et les villes Empersoises durent réquisitionner des travailleurs qu'elles envoyèrent à Ephyne, pour les moissons de la capitale.

Néanmoins, la piétiaille était nombreuse, et se soutenait mutuellement, ce qui rendait les troupes plutôt confiante. Les légendes allaient bon train sur les femmes de Catrisis, qu'on disait belles.
De leur coté, les nobles se préparaient avec un grand calme, ils ne se préoccupaient que de l'état des routes, qui pourraient fatiguer les précieux destriers, et, optionnellement les fantassins. La guerre était réclamée depuis déjà assez longtemps, et elle venait enfin.

Le plan des tacticiens Ephynois était simple : une victoire numérique écrasante, qui engendrerait une vague de joie de retour au pays, suivie d'une augmentation des impôts que la population prendrait mieux qu'à l'accoutumée.
Ephyne allait gagner en richesse, en puissance, et en réputation.
C'est ainsi que la longue troupe traversa la frontière, puis pénétra en territoire Beilan, dont le Roy était normalement favorable à la punition de la Dame.

- Seigneur, les armées ephynoises ont vidé leur cité !

Le messager, qui venait d'arriver d'une longue chevauchée, était encore couvert de la poussière du voyage et presque terrassé par la fatigue. Mais il avertit néanmoins promptement Lary de cette affaire, qui s'écria :

- Les rumeurs le laissaient entendre, mais... Je m'afflige de ce qu'il va advenir de ce jeune couple, par les Scirjii, et...

Se levant d'un bond, un Capitaine de colonne ne put alors s'empêcher d'interrompre son maître, disant :

- Mais, ce Prince, est kandrasien ! Que dirait notre Karsper, s'il vous entendait ! Que la Kandrasie soit affaiblie, et tant mieux ! Vous avez du poids, en Aevenspir, essayez de favoriser cette offensive !

Lary se prit le front dans les mains. Heureusement qu'il n'était pas Karsper, songea-t'il : il se laissait trop facilement dominer par ses sentiments. Il reprit, soupirant :

- Eh bien, attendez le retour de notre Karsper Mogus. Après tout, peut être lancera-t'il sur-le-champ une charge hurlante d'aevenspeer pour réduire nos si horribles et si acharnés ennemis kandrasiens. Et cela ne sera pour déplaire à quiconque, sinon aux préceptes de ma soeur disparue, mais puisqu'elle n'est plus là pour faire entendre sa parole... Toutefois, pour le moment, les Mogus ne sont pas de retour, et moi je dis Ot imetki Scirjii, Saart Lesmer ! *


* Par les Scirjii, que l'agressivité soit rangée de coté !

Lorsqu’Enimia apprit les rumeurs, elle était toujours à Elderine. Elle écrivit d’abord à son Roy et aux autres Seigneurs du Beilan pour leur demander assistance. Elle leur joint la correspondance qu’elle avait eu avec le Seigneur Quentin pour justifier les menaces qu’elle avait proféré à l’égard de cet empersois et les rassura sur le fait que ses armées n’avaient pas été en Empersiste. Elle ne savait pas si son Roy la soutiendrait. Elle lui avait été fidèle et avait participé au dévelloppemment du Beilan, mais parfois les méandres de la politique menaient à des surprises. Elle pensa qu’enfin Retrahant pourrait voir si le Beilan pouvait être un territoire indépendant et non une simple province de l’Empersiste.

Elle décida de quitter Elderine non pas vers le Royaume de l’Elbre et l’îlot de la Perfidie, mais vers un autre territoire. Elle irait la rencontrer et lui demanderait assistance, car la famille de cette femme avait jusque là toujours protégé sa famille maternelle. Son entourage et son époux tentèrent de lui faire renoncer à ce voyage, car elle était enceinte. Elle n’écouta pas leur recommandation et décida de partir le jour même vers une destination qu’elle leur cacha. Elle fit ses adieux à son époux en lui recommandant de ne pas envoyer de troupes au Beilan, car il pourrait s’agir d’un piège et qu’une armée pouvait également se diriger vers la capitale kandrasienne. Les Perfidiens encore présents à Elderine partirent pour Catrisis sauf Svold Kastriss qui partit pour la capitale orcumienne demandé assistance au Grand Tiram. Il espérait convaincre ce dernier d’aider des héosiens. Elle partit accompagner de Wald warz Katzar et de trois gardes du corps vers ce territoire, où elle n’avait jamais été.

Apprenant le soutien du Roy pour la femme du Delta, les ardeurs de l'Ephynois furent éteintes, ce refus de le laisser agir apparaissait comme un seau d'eau, la même que celle qu'on utilise pour laver les animaux, ou pour réanimer les gens.

Il décida à regret de faire faire demi tour, et de repartir vers l'Empersiste. Les soldats grognèrent mais obéirent.

Dertil souhaitait conserver l'amitié du Roy, et il estimait que respecter son intention de protéger ses seigneurs était la bonne façon de le faire. Après tout, c'est ce que lui même faisait. Il se sépara d'ailleurs de l'armée et partit vers Beila, la Cité sur l'Eau.

ah ?

Edit-Warzar : Je suppose que c'est une boutade destinée à faire rire les autres joueurs... Un post d'un mot, c'est rare, mais ça ne devrait pas exister dans les parties RP.

Les éclaireurs avaient fait irruption au castel, toujours en construction, et Quentin avait été surpris de la vigueur des réactions.

Ainsi donc, ils ne m'ont pas écouté.
Ne les ai je point mis en garde de laisser l'Intendant d'Ephyne la troublante hors de nos échanges?
Les sots!
Ils n'ont même pas conçu qu'ils allaient être punis par là ou ils avaient pêché.

Il se retourna vers la troupe rassemblée dans la salle d'arme.

Soldats!
J'avais caressé l'espoir d'aller régler seul le différent à propos du quel je me sens lésé.
Il en sera autrement, et il vous appartient de porter haut les mille couleurs.
J'ai confiance en vous autant qu'en vos destriers, aussi crottés soient ils.
Je sais que vous ne ferez pas défaut
Car il ne sera pas dit qu'Astalgan se tiendra en retrait de la bataille,
Alors qu'Astalgan en a été source.
Vous rejoindrez l'Intendant à Ephyne, et mettrez vos lames à sa disposition
Seigneur, qui nous mènera à la Gloire dans la bataille?

Celui qui avait parlé était de haute stature, et ses mains étaient connues pour avoir brisé les cornes d'un taureau lors de ses années d'apprentissage.

Je n'ai aucune légitimité pour adouber l'un de mes écuyers alors que je ne suis que Chevalier
Mais c'est à toi, Erwan, que je confie l'ost

Les choses étaient dites, et chaque homme se dirigea prestement vers sa monture.

Bien. Je peux enfin finir les préparatifs de mon voyage.Je suis impatient de découvrir...
Il fut interrompu dans le fil de ses pensées par le braiement d'une mule sur le pont levis.
Fraigoulet était rentré.
Enfin.

Les tacticiens Ephynois avaient imposé une marche forcée, et les soldats avaient traversé l'Empersiste à raison de plusieurs dizaines de kilomètres par jour.

Ils avaient continué vers le Sud-Ouest, et la Kandrasie. En effet, l'Intendant avait ouï dire que Enimia résidait chez son époux, et il s'était décidé à aller chercher la malfaisante la où elle se trouvait.
De plus, il avait été insulté, et bien qu'il n'en ait pas vraiment pris ombrage, il aimait à fouler du pied l'arrogance première de son adversaire.

L'arrivée devant les murs blancs d'Elderine se fit dans la bonne humeur, le froid commencant à se faire sentir. Les grands feux qui jalonnaient les positions Empersoises réchauffaient les coeurs et les membres engourdis. Les trebuchets tiraient régulièrement, procédant à des tirs pour évaluer la distance et l'endroit le plus faible. Ironie du sort, ils étaient faits de Belte, arraché aux forêts alentour. Aucun affrontement n'était normalement à craindre, puisque les troupes n'avaient pas fait halte à Ephyne comme il était prévu, et comme certains espions avaient du le dire à leurs maîtres étrangers.
On pensait pouvoir envahir la ville au printemps, pillant et massacrant parmi les fleurs bourgeonnantes de la capitale.

Voyant les troupes empersoises assiègeant la capitale kandrasienne et ayant pris connaissance des rumeurs selon lesquelles l'intendant empersois pourchassé sa maîtresse, un des trois officiers de l'îlot de la Perfidie étant resté à Elderine se rendit auprès des assiégeants. Il savait que son destin serait funeste.

Seigneur Intendant d'Empersite,

Si votre objectif est de trouver en ces lieux la Baronne, vous faites fausse route. Elle a quitté Elderine lorsqu'elle a appris que vos troupes se dirigeaient vers notre îlot.

Il est tout de même surprenant que vous vouliez punir la Baronne, une des plus fidèle vassale de votre ami, le Roy Drehëran, selon les dires de mon Roy. Il semble que vous n'avez cure des dires de votre ami.

Par ailleurs, il me semble qu'il ne vous ait pas utile d'assiéger Elderine, car il semble que votre objectif premier est de punir ma maîtresse qui n'est point dans cette cité. Des malfaisants disent que vous avez trouvé une excuse pour piller la capitale Kandrasienne qui est plus lucrative que notre cité et qui évitera de froisser le Roy du Beilan. Mais, je ne peux croire que vous êtes tel un rat que l'on a sevré et qui, par vengeance est près à tuer mère et père pour assouvir sa soif de vengeance. Faites taire ces mauvaises langues et retourner à Ephyne

Devant les enceintes d'Elderine, vous avez envoyé environ 15000 soldats de votre armée. Les mêmes qui furent devant Catrisis, il y a peu.

Si vous décidez malgré le fait que la Baronne Enimia Sidh ne soit pas en ces lieux de détruire Elderine, j'espère que les Seigneurs de Retrahant sauront se liguer contre vous pour anéantir vos désirs impérialistes.

"Soldats, reconduisez cet homme aux murailles d'Elderine.

Tant que je n'aurais pas retourné chaque pierre de cette cité, je ne serais pas convaincu qu'Enimia est bien partie! C'est pourquoi le siège continuera. Bien sur, si nous capturons un des membres de la famille princière, il pourrait nous accompagner en Empersiste, pour... découvrir nos cellules tant qu' Enimia ne serait pas capturée.

Bien sur, tout cela peut être arrêté très facilement. Elderine devra verser un tribut, et Enimia être livrée. Mais je suis sûr que ca n'arrivera pas, ta maîtresse étant trop prétentieuse pour se rendre."

Dans le même temps, des bandes de soldats Empersois parcouraient la région, les plus grosses osant même attaquer les villes Kandrasiennes sans défense, pillant, violant, massacrant dans tous les villages de la Kandrasie.

"Vous n'avez pillé que la cité de ma grand-mère Enia d'Istria ; aucun kandrasien autre que ma famille n'a pour le moment subi vos attaques et cela restera ainsi ; j'ai parlé.
Concernant votre offre de paix, elle serait plus défavorable au peuple kandrasien que la perte d'Elderine aussi vous pouvez poursuivre votre siège, mon brave."

Edit : à travers une missive envoyée par la flèche d'un archer

Grehn en avait assez vu...

Il descendit des courtines contournant une tour en essayant d'éviter tant bien que mal les archers Kandrasiens s'affairant à prendre position et à disposer les flèches dans chaque recoin et à mettre des armes supplémentaires derrière de minces barils.

La fumée au loin montrait la construction de trébuchets supplémentaires et le nombre incalculable de tentes ne présageait rien de bon... Il rejoignit deux Touragiens qui fixaient l'horizon, stoïque.

Les Kandrasiens ont une belle visite il semblerait… Les seigneurs du Bas-Monde entame les pillages d’antan avec cette fois ci des armées bien supérieures à ce que j’ai jadis connu.

Il soupira et regarda l’amoncellement en contrebas d’armures et d’étendards…

Nous avons nos ordres… La relève devait venir la saison prochaine, mais il semblerait que nous allons devoir défendre l’ambassade avec une poignée de Touragiens.

Les deux autres Touragiens ne bronchèrent pas à ces mots, ils avaient déjà connu ce genre de situation. L’ambassade était un îlot Beilanais au sein même de la Kandrasie et même les envahisseurs ne pouvaient s’octroyer le droit d’y rentrer sans l’autorisation des autorités Beilanaises.

Faites rentrer les Touragiens et tout autre Beilanais. Je ne veux pas d’incident diplomatique sur les mains… N’empirons pas les choses…

Les trois Touragiens prirent le chemin de l’Allée du Roi, à travers une ville tumultueuse et où un sentiment oppressant régnait. La ville aux fleurs et à la population joyeuse était sombre à présent, les visages graves, les nuages gris obstruant le ciel et les rues jalonnées de gardes et soldats courant de toutes parts, chargées de chariots de vivres, de chevaux engoncés de maille et d’armes à profusion… Qui aurait pensé qu’Elderine la Blanche serait la cible du Fol d’Ephyne.

Les portes de Diospyros se fermèrent avec un grand bruit sourd, les derniers Touragiens et Beilanais en territoire du Royaume de l’Elbre…

Le siège avait commencé depuis plusieurs jours, les trébuchets étaient toujours en construction. Un cavalier revêtant une armure portant le blason de la Baronne Enimia vint remettre un message à l’intendant empersois.

« Seigneur Intendant Dertil de Crykas,

Tout d’abord, vous laissez courir des rumeurs que vous alliez attaquer ma cité car j’avais menacé un Seigneur Empersois. Ensuite, vous assiégez Elderine sous prétexte de laver les insultes que j’aurais dites à votre égard. Je ne vous ai jamais personnellement insulté, mes vassaux l’ont fait, il est vrai, vous auriez pu me demander leurs têtes.

Enfin, ne perdons pas de temps à chipoter, je pense que le fait que vous annoncez, à tout vent, que vous voulez me capturer, est un prétexte pour piller le territoire kandrasien.

Mon époux refuse que je me livre. Vous connaissez l’honneur kandrasien. Mais, je suis encore libre de mes actes. Ainsi, si le fait de me livrer à vous, peut sauver Elderine et des vies innocentes, je le ferai.

Bien entendu, j’ai une confiance limitée en vous, sans vouloir vous insulter. Comme vous le savez, je ne suis point à Elderine ni à Catrisis. Mais, je m’engage à venir me livrer par moi-même, dès la saison prochaine à Ephyne, si vous arrêtez le siège d’Elderine et que vos troupes et ceux de vos alliés rentrent en Empersiste en ayant cessé tout pillage en Kandrasie. Je veux que vous engagiez publiquement devant notre dieu Gaëd que vous et vos alliés n’attaquerez plus la Kandrasie pendant au moins les vingt prochaines années, sauf, bien entendu, en cas d’invasion de leur part de l’Empersiste. Je dis bien invasion, je ne parle pas d’un raide d’un Seigneur kandrasien ayant été gagné par la folie.

Vous me répondrez que vous n’avez point non plus confiance en ma parole. C’est pourquoi je le jure devant notre dieu Gaëd que si vous faites ce que je vous demande, je viendrais me livrer de moi-même à Ephyne. Et alors, me direz-vous ?

Vous savez comme moi que votre ami, le Roy du Royaume de l’Elbre qui est très pieux fera en sorte qu’une de ces Baronnes ne respectant pas un serment devant Gaëd, soit punie. En cas, de non respect de ma parole, il vous laissera alors piller Catrisis et même vous y aidera. Vous avez ainsi tout assurance que je tiendrais ma parole.

Si vous refusez cette offre, les Seigneurs de Retrahant auront compris que votre seul objectif est de piller aveuglément et sans raison. »

"Tu transmettras à ta maitresse le message suivant :

Je continuerais le siège contre la cité d'Elderine, car j'ai envie de prouver aux Kandrasiens, et au reste du monde, que l'Empersiste n'est pas un territoire faible qui n'a aucune possibilité. Tu lui demanderas pourquoi je devrais me plier à ses conditions, sachant que je l'amènerais à se plier aux miennes."

Puis, pour lui même.

"Si je peux capturer les deux époux, pourquoi m'en priver? Le courroux empersois est totalement justifié."

Un grand homme emmitouflé dans sa cape, qui se trouvait non loin et qui venait de saisir la teneur des derniers événements, se hâta vers un des représentants de Dertil de Crykas et dit :

- Aevenspir ne peut que soutenir une offensive dirigée contre les forces kandrasiennes, tout au moins tant que les Mogus seront chez nous au pouvoir. Et nous soutiendrons la résolution de votre Intendant... Enfin, quand je dis "nous"... Je vais retourner annoncer ces nouvelles à mon maître Lary, mais le connaissant... En apprenant que la Dame à l'origine de la querelle s'est disposée personnellement à la merci totale de son ennemi, et sans aucune condition pour elle même, si le siège était levé, eh bien, avec ce refus ephynois, il sera courroucé, je suppose. Bien sûr, le Prince aurait dû rajouter à cette offre généreuse le remboursement des trébuchets empersois, mais cela devrait être bien en deçà de ce qu'il perdrait si sa ville était détruite, ne fut-ce que pour son prestige.

Bref, tiens. Oui, en effet ! Je parierais ma solde que la Baronne s'est peut être vue refuser son offre, mais qu'elle aura au moins gagné le soutien d'un Aevenspeer de par chez nous. Sur ce, je te salue, camarade.

Et il se dirigea vers son robuste petit ceaespeer en vue de galoper vers sa contrée.

Le savoir des tacticiens Ephynois se perdait sûrement, ou bien étaient-ils tellement poussés par l'Intendant, qu'ils n'avaient pas réussi à se concentrer, peu importe, ils s'étaient trompés, et cela s'entendait : Dertil criait à pleins poumons contre les responsables, les nobles maugréaien en silence dans un coin, leur allure dangereuse n'étant pas pour rassurer les ingénieurs, et la piétaille grondait.

Les réserves allaient s'amoindrir, et les hommes commencaient à être las de ce pays qui ne voulait pas céder.

La bataille devant les murs fut d'une violence terrible, les Kandrasiens qui se battaient avec une rage extraordinaire chargèrent, causant de gros dégâts dans le carré Empersois. Néanmoins, en enchaînant retraites et charges, les Empersois surent exposer leurs ennemis aux flèches mortelles. Une fois l'armée Kandrasienne réduite à l'état de corps sans vie, les Empersois décidèrent que les murailles ne devaient plus être défendues par les archers de la garnison. Les coups de bélier s'enchainèrent, fracturant peu à peu la lourde porte d'Elderine.
Puis elle céda, les soldats Empersois, pour un temps transformés en bandits rentrèrent dans les maisons cossues des hauts quartiers d'Elderine. Tous les bâtiments furent visités, tous, sauf quelques ambassades, dont l'Intendant en personne avait interdit l'accès. Quelques hommes avaient songé à y aller, mais une milice Empersoise s'empressa de les stopper. Les soldats avaient choisi leur partenaire parmi la population, et de nombreuses femmes connurent l'amour étranger, alors qu'elles venaient de perdre leur mari, bien entendu, résister revenait à s'exposer aux courroux du vainqueur.
Pour finir, ils firent nombre de prisonniers, et les emmenèrent en dehors de la ville où ils les rassemblèrent.

Les Empersois, accompagnant les prisonniers Kandrasiens repartirent vers leur pays. Les hommes étaient à bout de force, et de nombreuses victimes furent à déplorer alors que l'armée levait le camp, la famine et le froid avaient eu raison d'eux.

C'est donc une armée considérablement amoindrie qui repartit vers Ephyne.

Pendant ce temps, les combats avaient un peu duré au palais des monts Quel'tan. Visiblement, les dirigeants préfèraient mourir, plutôt que de se rendre, surtout que la population était à la merci des envahisseurs.
Il fallut le coup de pommeau d'un chevalier peu connu pour assomer le Prince Aectelion. Ce coup permit à ses assaillants de le transporter dans la tente devant les murs, il y discuterait avec Dertil. Le frère du Prince, blessé dans un combat, évanoui, fut soigné pour être interrogé lui aussi.

Le siège d'Elderine avait pris fin.

Enimia fut affectée par la chute d’Elderine, bien qu’elle sût depuis plusieurs jours que la cause était perdue. Elle n'avait pu éviter ce drame même en sacrifiant sa propre personne. Lorsqu’elle eut pris connaissance du déroulement de la bataille, elle maudit les généraux kandrasiens et beilannais qui lui avaient conseillé de ne pas envoyer les soldats de Catrisis et de ses alliés à la rescousse d’Elderine estimant que les remparts de la cité tomberaient avant l’arrivée des troupes. Ces incapables avaient sous-estimé la résistance des fortifications face aux trébuchets.

Les exactions des troupes empersoises sur la population civile la scandalisèrent. Les viols étaient courants lors d’une prise d’une cité, mais le commandant des armées assaillantes pouvait s’arranger pour protéger les nobles de la cité. Le cas présent, seules les ambassades avaient été préservées, Dertyl, décidément, craignait le courroux de son Roy. Mais, surtout, il avait voulu humilier les kandrasiens et elle espèra que ces terribles événements resteraient graver dans la mémoire de ce peuple et que l’intendant empersois soit maudit à jamais. La présence du Seigneur Quentin au coté de son intendant confirma que ses principes qu’il aimait exposer dans ses lettres n’étaient que foutaises. Etant donné les troupes insignifiantes qu’il avait à Elderine, il était juste venu pour assister au pillage et aux viols voir pour y participer lui-même.

Bien entendu, ce qui la perturba le plus était la capture de son époux, au moins, il était encore en vie. Elle écrivit à l’intendant empersois pour lui demander de relâcher le prince kandrasien et sa famille.

- Ainsi, le Prince a attaqué lui même ses assaillants, sans vouloir attendre derrière ses murs les salves de trébuchets et l'assaut de ses ennemis ? Voilà qui honore les principes de la Kandrasie, cet homme est courageux. Toutefois, je...

Apercevant finalement la lueur dans les yeux de ses généraux, et distinguant les chuchotements, Lary s'écria en s'étranglant Ot imetki aseqc Scirjii, Eheelmi Kemzer ! *

Se rasseyant lourdement sur son fauteuil seigneurial, Lary regarda un messager qui se dirigeait vers lui, qui déroula son parchemin et qui se mit à lire d'une voix monotone.

" Rapport du coursier Alebarer :

On raconte que le seigneur Karsten Aradras est parti, maître, avec une partie de son Ost, selon certains témoins... La révolte aurait grondé dans son armée contre l'absence d'offensive aevenspeer en Kandrasie malgré le contexte très favorable... Un messager est parti de Val D'airain, porteur d'un message de sa part à votre intention... Il semble qu'il devrait arriver sous peu, et que... "

Lary se tassa. De toute façon, quelle importance, pensa-t'il en imaginant le Karsper précipiter tous ses mogus et tous ses aevenspeer sur la Kandrasie affaiblie, dès son imminent retour. Une étincelle brilla dans ses yeux et, appelant un fidèle serviteur, il lui chuchota tout doucement :

- A ! Spzerak shakwuz. Spe Karsper illere, jezenad egen Mogus. Effelir ! **



* Par tous les Scirjii, je vous interdis d'attaquer !

** Tonnerre ! Je commence à être vraiment courroucé par cette affaire. Fais en sorte que le Karsper reste loin d'ici, ainsi que tout autre Mogus. Vole, et vite !

L'homme en noir jouait distraitement avecun insecte. Sa main courait sur la table, l"ensserrant de ses doigts puis le laissant s'enfuir par une ouverture. Toute la progression l'amenait vers le centre de la table.

Un serviteur entra dans la pièce et s'immobilisa prés de l'homme. Celui ci leva les yeux interrogateurs.
Le serviteur prononça alors ces quelques mots:

" Ils sont morts, pas un n'en a réchappé "

Le seigneur tourna ses yeux vers la table et écrasa l'insecte tout en murmurant:

" Et tout celà pour rien. Enfin nous aurons vengé nos morts "

La troupe défilait sous la barbacane. Nul hourra ne venait saluer leur passage. Les hommes passaient les épaules basses, les étendards étaient dirigés vers le sol. La foule semblait retenir son souffle.
Puis les charettes arrivèrent, chargés de corps et les cris montèrent au ciel quand les femmes se précipitèrent pour chercher la dépouille d'un père, d'un frère ou d'un fils.

L'homme en noir se tourna vers son capitaine :

-Etes vous sûr de ne pas en avoir laissé?

-Oui Seigneur nous avons récupéré tous les corps.

Une expresion de haine passa fugacement sur le visage de son interlocuteur.

-Non je parlais des aevenspeers.La mort était une peine trop douce pour eux.

-Je ne pourrais l'affirmer, Seigneur, tout s'est passé si rapidement. Ces diables se sont battus avec une telle férocité.

L'homme en noir soupira :

-Enfin nos hommes auront appris le goût du sang. Bientôt ils auront l'occasion de s'en abreuver. Va et dis aux hommes que leur honneur est sauf.

Puis se tournant vers un scribe:

-Toi fais une lettre à l'intendant des avenspeers...Dis lui que nous avons le regret de lui annoncer le décès de quelques hommes de son peuple sans doute méllés malencontreusement à des combats avec des pillards. Tu lui diras que n'ayant pu séparer les uns et les autres, nous avons brulé tous les corps pour éviter la purulence. Mets y les formes...Allez va!

Plus bas comme pour lui même:

-Oui mets y les formes. nous y mettrons un jour le fer.

Nayrhn venait de terminer sa retraite dans les hauts monts de l' Aevenspir, a cet endroit, le plus proche des cieux de retrahant, ou la roche et la glace ne font plus qu'un.

Après seulement quelques jours de retour en sa citée les nouvelles étaient parvenues à un rythme fou, des mouvements de troupe, des guerres, la Kandrasie affaiblit puis finalement mise au sol.

La Kandrasie, pour un descendant de la lignée Fareiss ce pays avait une signification particulère, l' ennemi éternel, immuable, capable de renaitre de ses cendres avec une vivacitée incroyable. Mais surtout un peuple, un peuple qui avait de nombreuses fois mélangé sont sang à celui du sien dans la boue des plaines défoncées par les batailles. Et voilà qu'on lui aprenait que son défi, son combat venait de lui être ravi par un seigneur des plaines. Cette victoire devait lui revenir à lui et non pas à ce Urian ...

Alors qu'il ruminait ces pensées entre deux scéances d'entrainement un messager se fit annoncer dans la salle de guerre d' Eskadner. Un messager étrangé, encore un homme des plaines, au corp élancé dépassant d' au moins une tête la plus part des Mogus.

Nayrhn lui fit signe d' entrer dans la grande salle de granit au plafond bas avec en son centre une table de pierre polie sur laquelle était gravée la carte de retrahant, seulement éclairé par des torches cette salle ne possédait pour seules ouvertures qu'une dizaine de meurtrière qui laissaient à peine filtrer un rayon de lumière faisant scintiller les petites poussières soulevées par un des gardes d' honneur des Mogus, individu portant le traditionel manteau noir goudronné des mercenaires et la vouge des Mogus.

Le messager s' inclina devant le chef de meute assis dans un siège robuste agrémenté de fourure et d' étoffe fines.

"De qui es-tu serviteur ? Et quel message apportes-tu ?"

Le nom du seigneur qui avait volé la victoire fit tiquer Nayrhn mais la missive semblait être de bon sentiment du moins dans le pays des monts ou les cadavres était généralement brulés en retrait de la ville.

"C' est une bien agréable attention de la part de ton seigneur qui me conduit à revoir le statut de trouble fête que je commençais à lui donner. Aussi, messager, tu lui diras que le peuple des Monts d' Aevenspir est un peuple honnorable et que nous savons rendre la politesse. Je suis heureux de mes hommes soit mort en combatant comme il se doit. Soit sans crainte et sache que pour prouver ma bonne foi je lui rendrai la pareil si ces hommes devait un jour mourir en mon territoire, je leurs rendraient les hommages comme nous le faisons chez nous."

Une autre nouvelle fini par parvenir, Elderine était abandonnée et personne ne la réclamait.

Nayrhn réfléchit plusieurs heures affalé dans son trône de granit.

"Dois-je profiter de cette occasion pour prendre Elderine ? Cela remonterait le moral des hommes de partir un peu en campagne, mais les combats ne seront que contre les quelques pillard qui ferons les restes de la ville ... Faire de la Kandrasie une province Aevenspir, voilà une occasion à saisir ...Allons-y donnez les ordres capitaines !"

Les dits capitaines, hommes typiquement Mogus petits et trapus partirent en courant vers leurs "divisions".

Soudainement ! On vit alors des contingents entiers de mogus armées jusqu'aux dents sortir tête baissée de leurs quartiers, au pas de charge ! Les cors résonnaient dans les montagnes. Fidèles à leur seigneur, les premiers vassaux du Karsper Mogus organisaient leurs hommes afin de le soutenir eux aussi en campagne.

Toutefois, il semblait certain que ce n'était ni le pillage ni les esclaves qui intéressaient les aevenspeers... L'avenir allait bientôt révéler les motivations du peuple du Pays des Rocs.

En tête de la meute, courant dans les neiges entourant la capitale, une ligne de cavalier montée sur les petits chevaux Aevenspeers ouvrait le passage dans la poudreuse. Les loups descendaient dans les voisines plaines des fiers Kandrasiens ...

Un messager monté sur un grand cheval Empersois dépassat l'armée en direction de Ambrosiane.