Retrahant, Ere impériale
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 Ustvholk

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Waelin Vlos

Waelin Vlos


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MessageSujet: Ustvholk   Ustvholk EmptyJeu 22 Mai - 23:38

"Ils croyaient leur maison éternelle, leur demeure établie pour des siècles ; sur les terres ils avaient mis des noms."
Troisième Traité de la Cabale de Reîh'li L'Renor


Une aube blafarde éveillait lentement Ustvholk.
Le soleil du matin, nu dans le ciel froid, s'élevait sur les terres maudites de Gramée, révélait au monde une poignée de cabanes brunes. Des habitations branlantes étaient vomis quelques villageois amorphes, qui s'activaient à avaler d'une traite les restes froids d'un dîner sans saveur. Sous les pilotis infestés d'une vase gris-vert, attendaient les barges, somnolant sur les eaux vénéneuses d'une veine d'Al fered. Lesquelles clapotaient doucement sur le bois pourri, bercées par un vent sinistre et iodé.

Un nouveau jour se levait lentement sur Ustvholk.
Tandis que la majorité embarquaient dans les petits bateaux sans voile, certains serfs se dirigeaient vers les forêts du seigneur, allant cueillir les fruits de quelques arbres fruitiers fatigués. Bien que ces derniers s'échinaient en de longs détours par la mangrove, ils ne pouvaient point s'empêcher d'embrasser d'un regard hésitant la demeure de leur maître à tous. Premièrement parce que tous les arbres alentours avaient été rasés et que le lieu, bâti sur une butte, attirerait l'oeil du plus rêveurs des voyageurs.
Deuxièmement parce qu'il était l'espoir et le cauchemar de tous les esclaves d'Ustvholk, le lieu d'où s'échappaient des cavaliers ivres de violence mais aussi celui dans lequel ils venaient se réfugier lorsqu'une autre bande de routiers venait s'en prendre à leur village.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyVen 23 Mai - 19:18

C'était un bloc de pierre grisâtre planté au sommet d'une petite butte. Ses murs ruinés étaient nus comme la terre qui l'encerclait, et seules claquaient sous le vent de l'est de lourde bannières de sable et de pourpre qui côtoyaient quatre portes massives. Une cour était sise à l'intérieur, centre du bâtiment. Les habitations se trouvaient dans les quatre murs épais, et le voyageur pouvait plaindre les hommes qui y résidaient, tant les fenêtres étaient rares et exiguës.

Au milieu de la cour, alors que l'aube déposait ses premiers rayons sur le sable ocre, se trouvait un autel d'allure complexe, recouvert de pierres semi-précieuses et de glyphes sûrement graméennes. A côté de lui, attaché sur un pal planté dans le sol, un jeune homme nu était fustigé par un homme vêtu d'une armure impeccable sous les yeux froids d'une assemblée d'hommes. Aux premiers rangs, trois hommes enrobés des couleurs du Cléricat, le noir et la pourpre, et derrière eux, une multitude de jeunes gens aux habits pauvres et au crâne rasé. Sur les flancs et l'arrière maraudaient quelques hommes en armure légère, armés de l'épée et du poignard.

S'ils se distinguaient les uns les autres par leur accoutrement, on pouvait voir chez ces hommes une caractéristique qui leur était commune. Aucun sentiment ne venait troubler leurs traits durs, à part le fustigé, qui tentait pourtant d'étouffer les cris de douleur venant ponctuer les coups réguliers et expert du bourreau.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptySam 24 Mai - 20:50

Desän n'avait connu que ces murs, et avait toujours vécu sous les lois difficiles d'Amk'Cherk, cloîtré dès son plus jeune âge dans une cellule avec d'autres enfants. On les avait d'abord laissé à leurs mères jusqu'à sept ans, le temps qu'ils soient dressés et assez forts. Ensuite, ils avaient rejoint les autres, et on les avait endurci peu à peu par l'effort et la souffrance. L'humiliation était part intégrante de leur éducation, car les prêtres qui veillaient sur eux étaient les gardes de leur rigueur et de leur respect des traditions du Cléricat. Leur foi et leur endurance étaient sans cesse éprouvée, et la nourriture, toujours insuffisante, affutait leurs instincts les plus primaires, leurs comportements les plus entreprenants.

C'était d'ailleurs à cause du manque de nourriture que Desän se retrouvait accroché à un poteau et fustigé par un guerrier. L'origine de cet outrage datait d'hier, au crépuscule, lorsque apporta la pitance dans la salle commune. L'adolescent, craignant que l'on ne tentât de lui dérober une pièce de chef accordée pour son entrain, s'isola dans sa cellule pour déguster le morceau de viande mensuel. Mais c'était sans compter sur la convoitise de ses Frères, qui, à deux, enfoncèrent sa porte et le tabassèrent.

Bien que vif, Desän ne put résister à la force combinée des deux assaillants, et dans le combat, cassa l'assiette de terre qui portait son repas. Le duo, laissant pour morte leur proie, se saisirent du dîner répandu et s'enfuirent. Le lendemain, lorsqu'on apprit que Desän avait brisé son auge, fut puni pour sa négligence.

Pourtant, le sort des deux voleurs n'avait rien d'enviable, car s'il avait été seul à subir le courroux des prêtres, il savait bien qu'on n'échappait jamais à leur vue. Ces derniers savaient l'association des deux malfaiteurs, et s'acharneront avec d'autant plus de violence. Non pas parce qu'ils avaient dérobé à Desän quelques morceaux de daim, mais parce qu'ils n'avaient pas eu la force de s'attaquer seul à ce dernier, trop faibles pour assurer leur victoire de leur seule volonté.

Les Révérends S'argt n'auront sûrement pas besoin d'agir directement. Les plus prompts comprendraient rapidement que les Faibles ne pouvaient disposer de la protection des Forts, et que les soldats chargés de discipliner les jeunes gens seraient pris d'un accès de cécité lorsque les deux malheureux seraient agressés par le reste de la meute, délesté de leur habit ou de leur nourriture. La vie dans la demeure d'Ilharn Wailin Vlos était une leçon de tous les jours ; et ce soir certains apprendront que l'audace n'était pas toujours récompensée.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyDim 25 Mai - 21:38

Après la fustigation, on offrit à Amk'Cherk une matinée de combat.
Sous le regard attentif de quelques S'argt, les jeunes gens s'entraînaient au baton, à la lutte, à la masse comme à l'épée. Souvent nus comme des vers, chacun s'échinait à ferrailler sec dans le sable de la cour, examiné avec froideur par des prêtres aussi immobiles que les colonnes qui soutenait les préaux accolés aux quatre murs formant un carré parfait.
Desän n'aurait pu dire si l'intensité accrue des coups de ses Frères venait de la fragilité qu'avaient provoqué ses cinquante coups de verges ou de l'approche de l'
Isto Zud'dar.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyLun 26 Mai - 18:57

Un esclave renversa un bol de bouillie.
Les guerriers surveillant les Frères s'approchaient déjà de la jeune fille, et ils n'étaient pas contents. Elle était tombée au milieu de la salle commune, entre les quatres tables autour desquelles s'agglutinaient alors tous les garçons affamés que cette demeure pouvait accueillir. Personne n'avait réagi. Les Frères se contentaient de manger la nourriture et de parler du Zud'dar.

Desän était loin de la scène, mais il ne put cependant s'empêcher de regarder les admonestations des soldats avec négligence, tout en s'entretenant sur l'épreuve du lendemain. L'Isto Zud'dar, institué par Ilhan Waelin lui-même, avait pour but d'éprouver la force et la volonté des garçons, que l'on chassait de la demeure une nuit. Armés d'un simple poignard et d'une cape usée, les garçons, accompagnés des prêtres, s'efforçaient à vivre de rapines. Dans la mangrove et pendant des jours entiers, ils erraient à l'affût, traquant les proies isolées et fuyant les bêtes sauvages. Beaucoup ne revenaient pas, morts de faim ou assassinés, par un Frère, une milice, voire un prêtre. Ces derniers ne faisaient qu'observer et suivre les plus féroces ; mais pour les faibles, c'était une autre affaire. On avait entendu beaucoup d'histoires sur l'Isto Zud'dar, mais jamais personne n'en parlait publiquement. Tout ce que l'on savait, c'est que certains étaient choisis par les prêtres.

Ces derniers, une fois revenus dans la demeure d'Ilhan Waelin, étaient bénis et marqués au fer rouge par l'Ilhan lui-même. Arborant alors la martre et les trois larmes de sang, symbole des Vlos et du Cléricat, les esclaves les vêtaient d'habits de guerriers, et ils partaient loin du temple, guidés par un prêtre. Là encore, les hypothèses abondaient. S'il était de notoriété publique que les Frères, lors de la saison du Sartis, illustraient la valeur des hommes d'Ilhan Waelin, entre leur départ et le Sartis, il y avait des mois de disparition.

Desän rumina cette inconnue rêveusement, puis remarqua que la jeune esclave n'était plus consciente, mais à terre, traînée par un guerrier au regard lourd de sous-entendus. On annonça la venue d'Ilhan Waelin. Tous se levèrent comme un seul homme et sortirent de la pièce afin de laisser au maître le calme qui lui était dû.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyMer 28 Mai - 13:01

La lune était à son zénith lorsqu'un prêtre vint réveiller Desän.
L'homme tout encapuchonné était accompagné de deux soldats à la trogne taillée à la hache, vêtus d'une armure légère. Il prononça une parole que Desän n'entendit pas, et devant le manque de réaction du garçon, fit un geste impérieux à ses molosses. Ils l'empoignèrent alors puis arrachèrent ses braies. Jeté à terre, le garçon battit en retraite dans un coin. Instinct stupide : il s'était acculé tout seul, comme une bête l'aurait fait. Le prêtre réagit à cet acte de bêtise par une moue dédaigneuse et se retira sans mot dire.
L'un des chiens, la gueule éclairée par un sourire goguenard, lui lança une cape de lin grossière et son poignard, avant d'emboîter le pas au maître.

Desän ne tarda pas à se relever, s'enrouler dans la cape sombre et à sortir de son austère cellule. On était en plein milieu de l'été, et pourtant la froidure nocturne de ce pays inhospitalier se mêlait au vent moite de l'Est, charriant embruns et humidité marins. Enlaçant la cape et serrant sa lame courte, il franchit la colonnade qui sépare sa cellule de la cour intérieure pour observer la réunion d'une vingtaine de Frères encadrée par les prêtres. Tous ne portaient que la cape et le poignard, certains étaient marqués par le zèle des soldats qui maintenant les encerclaient.

Il rejoignit prestement les siens, se mêlant à eux et observant le silence pesant qui régnait dans la cour inondée par la lumière de la pleine lune.
Certains s'attendaient à un discours, des indications, un semblant d'explication de la part du prêtre qui trônait à côté de l'autel central. Il fallait être stupide pour croire que l'on pourrait, par des mots et des palabres, faire comprendre aux hommes ce qu'une vie d'entraînement et de dressage était seule à pouvoir leur faire entrevoir. S'ils étaient réunis ici, c'est parce qu'on allait éprouver leur vraie force ; cette nuit les lâches seront confondus ; cette nuit on séparera le bon grain de l'ivraie. Les Forts se distingueront des faibles.

La porte du Nord s'ouvrit dans le silence le plus total. Les soldats dégainèrent leurs épées.
Le prêtre, enfin, ouvrit la bouche et dit d'un ton solennel.

"Non'jahr itami l'Isto Zud'dar"
Ainsi commençait l'épreuve de Nuit. La Cryptie graméenne.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyJeu 29 Mai - 18:20

L'aube se levait quand Desän, blessé à la hanche, découvrit un petit hameau. Cela faisait plusieurs heures qu'il tentait d'échapper aux soldats du maître, et ce, avec plus de succès que certains. Dès que le prêtre avait annoncé le début de l'épreuve, les hommes de mains du temple s'étaient élancés contre le petit groupe de garçons, brandissant l'épée. Certains étaient restés sur place pour vendre chèrement leur vie ; d'autres s'étaient enfuis. Après avoir compris que le combat ne servirait qu'à le faire tuer, Desän rejoignit le reste du groupe, qui, après un temps de flottement, se jeta vers la sortie.

Mais la soldatesque ne les avait pas lâché, et ils avaient été poursuivis dans la mangrove. Pendant près d'une heure, il tenta de semer Armahk, un homme avec qui il avait l'habitude de parler lors des soupers, quand il était de garde. L'homme avait renoncé, à bout de souffle ou arrêté par un quelconque obstacle. Une fois que Desän n'était plus obnubilé par l'incendie qui s'était engouffré dans ses poumons mortifiés par la traque, il se demanda quelle était la leçon à retenir de ceci. La conclusion la plus logique qui lui venait était que la confiance n'existe pas, pas même pour le maître, qu'il ne devait l'offrir à personne. Bien sûr, il ne pouvait donner foi à cette supposition ; c'était refuser tout ce qu'on lui avait appris. Il remit à plus tard ses réflexions pour se concentrer sur sa survie.

Cependant, lorsqu'il entra dans le petit village, il se garda bien de se montrer et rampa jusqu'à une hutte fragile mitoyenne d'une petite étable.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyVen 30 Mai - 23:46

Trop nombreux, pensa Desän.
La cabane était pleine à craquer. Trois bambins nageaient dans la boue qui devait constituer le sol du logis, et une femme à l'air las allaitait un tout petit, sous le regard placide du père de famille, qui, avec un autre homme - sûrement son frère, à en juger par leur physique - mâchait avec énergie et fatigue à la fois une bouillie sans nom.
Les hommes avaient l'air d'être de solides gaillards. Desän n'avait aucune chance. Il rampa vers le coeur du hameau, s'approchant sans le vouloir de la seule demeure qui semblait être bâtie avec autre chose que des joncs et de la fange. Des murs de pierres protégeaient même une partie de la maison, qui était immense, comparée au chaos de masures qui l'encerclait.

C'était ici la demeure d'un riche veuf, un maître verrier assez connu dans la région et qui, dans une contrée plus juste, aurait vécu chez les meilleurs des princes, dans un palais cent fois plus grand et plus riche que sa triste demeure. Il avait une fille et un fils, qui dormaient tous deux dans leurs chambres, car ils avaient été habitués à une vie plus douce. Le maître verrier les aimait grandement ; il ne voulait pas que ses enfants stagnent dans l'eau croupissante des marais de Gramée. Il leur avait même payé un précepteur, afin qu'ils apprennent l'empersois, la langue sacrée et les choses utiles aux pieds secs. C'était un clerc indarae, secte peu connue en dehors des marais, mais fameuse en Gramée ; le maître verrier s'était attaché à sa sagesse et le talent qu'il avait de rendre toutes choses simples.

Lorsque Desän vint épier la demeure du maître verrier, il trouva ce dernier attablé avec le clerc indarae, mangeant à leur fin fromages, fruits et viande froide. Un feu crépitait, sur lequel bouillait une étrange infusion aux odeurs revigorantes. Devant une telle scène, le garçon ne put se retenir. Il se glissa comme un serpent dans la salle de vie du verrier. Il frissonna au contact de la pierre froide, mais avança avec prudence, jusqu'à la table. A quelques pas des deux hommes, il s'élança d'un jet fulgurant, sautant sur la lourde table et ses serres saisirent un fromage et quelques fruits.

Sous le choc, le clerc tomba lourdement en arrière, gesticulant ridiculement, mais le maître verrier, peut-être plus habitué aux larcins des enfants du village, attrapa la cape de Desän. Ce dernier s'en défit d'un geste brusque et paniqué, et se retrouva nu face au verrier, la lame de son poignard au clair. Le silence s'imposa de lui-même, car si la tension courait sur l'échine toute entière du garçon, le maître verrier considérait avec terreur la petite créature qui le menaçait avec une dague. Les secondes passèrent dans une lenteur insoutenable, les deux adversaires pesant le pour et le contre de chacune de leurs réactions. Ce fut l'enfant qui agit le premier. Les paroles des prêtres lui revinrent ; sur les Forts et les faibles. Sur ceux qui baissaient leur garde. Et surtout, le code de conduite qui s'imposait aux garçons d'Ilhan Waelin : Rothrl, Elendar, Har'luth.

Poussé par la peur de devenir un couard, un faible, il se jeta sur l'adulte géant et planta trois fois son couteau dans la trachée de ce dernier, transperçant sa cape avec rage et exactitude. Les gestes de l'entraînement lui revenaient. Maintenir l'adversaire, viser la gorge. Maintenir, viser. Le sang éclaboussa l'enfant, qui tomba avec feu le maître verrier. Il continua un instant à assener de coups le cadavre, pour s'assurer de sa mort, ou emporté par sa violence. Il se releva lentement. Il était nu et couvert de sang. Ses mains tremblaient et son regard couraient dans toute la pièce, à la recherche d'un prêtre qui béniraient son acte ou le tuerait. Il ne trouva aucun prêtre.

Juste l'indarae, qui le regardait d'un air curieux. Le clerc devant lui un enfant au crâne rasé et au visage barbouillé d'hémoglobine. C'était son premier meurtre. Il avait douze ans. Et ses mains tremblaient.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptySam 31 Mai - 20:13

L'indarae ne résista pas, lui. Et le feu prit vite la bâtisse. Une fois le bâtiment incendié et le ventre plein, le garçon reprit sa cape et s'enfuit par une des rares fenêtres, rampa le plus loin possible du village qui s'éveillait et s'écriait devant la présence des flammes. Sans s'éloigner, l'enfant campa à l'orée de la mangrove, à moitié embourbé dans les eaux boueuses d'un ru serein. L'eau était assez chaud pour qu'il se contente de cette position peu avantageuse. Au moins pouvait-il observer les actions des villageois et, en cas d'alerte, plonger entièrement dans le lit de la petite rivière.

Il faillit s'exécuter lorsqu'il entendit les habitants crier avoir capturé un garçon. Une fois calmé, il put constater que l'un des siens étaient tombés dans leurs mains. Il pensa d'abord mener une opération de sauvetage pour son Frère, mais le nombre des assaillants était trop nombreux, et il avait appris que les faibles ne pouvaient jouir d'aucune miséricorde. Le temps passa où Desän réfléchit à la situation de son Frère, qu'il voyait être malmené et battu par les ennemis, là, au milieu de ce qui constituait le hameau.

Partagé entre la fuite et le combat, il hésita longtemps. Puis la faim revint. Il s'enfonça alors à travers le sous-bois pour y trouver de la nourriture
.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyDim 1 Juin - 19:21

L'assemblée des paysans s'était un peu désemplie lorsqu'ils durent assurer leur subsistance. La plupart des gueux s'enfoncèrent dans la mangrove ou, à bord de petites barges, rejoignirent l'Al Fered pour y pêcher. Quelques jeunes gens étaient cependant restés près de l'enfant capturé, ainsi qu'un vieillard étrangement décoré. Couvert de couleurs vives et bariolées, de plumes qui fusaient de sa chevelure grisâtre et d'une moitié de masque qui recouvrait toute la partie inférieure de son visage, il semblait doté d'énormes dents rouges.
D'autres jeunes gens, à l'intérieure même la maison calcinée, précédent lieu de restauration de Desän, semblaient bâtir un grand bûcher et l'enrichir de petites sculptures.

Desän comprit alors qu'ils comptaient offrir son Frère aux flammes, pour apaiser les âmes avides de vengeance qui étaient mortes dans l'incendie du matin. Cette idée déchira encore plus le jeune homme. Toujours à moité plongé dans une mare, il se demandait ce qu'il fallait faire. Il avait peur des hommes armés qui encerclaient son frère, mais il savait que ce dernier avait échoué, qu'il n'avait pas été assez fort pour s'enfuir. Devait-il le laisser à son sort ? Cependant, devait-il abandonner face à la volonté de vengeance injuste du village ? N'était-ce pas de la lâcheté ?

Ce dernier point de vue prit peu à peu empire de l'enfant, qui se décida à secourir son Frère, non pas parce qu'il était son Frère, mais parce qu'il ne devait pas ressentir une quelconque impuissance vis-à-vis de ces villageois. Il devait se prouver qu'il était le Fort.

Quelques minutes avant que le soleil n'atteigne son zénith, les jeunes gens du village virent foncer sur lui un garçon au crâne rasé qui criait à pleins poumons, d'une voix aigu et perçante. Armés de gourdins et nombreux, ils rirent de l'enfant. Mais le silence vint s'imposer lorsque l'un d'entre eux tomba au sol, une dague enfoncée en plein coeur. La panique qui les anima pendant quelques secondes permit à Desän de se jeter sur le cadavre et de se saisir de nouveau de son arme de jet. Pour l'enfoncer dans l'entrejambe d'un des paysans, qui cria de douleur. Se ressaisissant subitement, les deux derniers hommes se jetèrent sur lui. L'un d'entre eux tomba avant même de pouvoir frapper, avec son morceau de bois, l'enfant. En effet, la dague enraya son avancée.

Le dernier, cependant, avait réussi à s'approcher de la teigne, laquelle ne put sauver sa vie qu'à son agilité. Roulant sur le côté instinctivement, il évita le coup de gourdin que lui assena de front le jeune paysan. Une série d'essais infructueux s'enclencha, jusqu'à ce que l'enfant sauta à la gorge de son adversaire. Si son poids ne fit pas basculer le gueux, le coup de poing qu'il lança au niveau de sa gorge eut raison de lui. Etouffant une insulte, le malheureux tomba à terre, et sa trachée vulnérable fut tranchée par les dents de lait de Desän.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyMar 3 Juin - 1:00

Les deux enfants coururent, coururent. Ils coururent jusqu'à ce que les cris des villageois s'affaiblissent, ils coururent jusqu'à ce que leur respiration les brûle comme de l'acide. A travers la mangrove, pieds nus et recouverts de capes voletant dans la poursuite, ils s'éreintaient, se blessaient, s'échinaient à fuir leurs assaillants. Ils s'enfoncèrent dans les marais, ils plongèrent dans des rivières tumultueuses et grimpèrent aux arbres malingres de Gramée, leur visage fouetté par le vent de l'Est, leur peau suante mélangée à l'humidité de la Gramée.

Si les cris s'estompèrent, ils ne disparurent pas. Peu à peu, les deux enfants perdirent de leur rapidité et agilité. L'un était blessé, l'autre mortifié par sa veille la nuit précédente. Alors qu'ils étaient à bout de force et crurent perdre toute volonté, sous le coup d'une fatigue douloureuse, ils s'arrêtèrent l'un après l'autre, bien décidés à défendre leur vie ou donner du fil à retordre aux chasseurs. Dégainant leur poignard, chancelant sur leurs jambes mal assurées et embourbées dans une marre de boue infecte, ils écoutèrent les bêtes des marais chanter et décorer de cris ponctuels ce milieu si hostile et pourtant si ouvert à toute forme de vie. Ils attendirent donc, respirant rapidement. Leur front perlaient de grosses gouttes de sueur, leurs yeux avaient rougi sous l'effort.

La troupe n'arriva pas. Au contraire : les cris avaient cessé. La poursuite s'achevait.
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyJeu 5 Juin - 23:15

ILS sortirent enfin de ce bois inondé dans lequel ils fuyaient, défaits, une horde de paysans imaginaires. Lorsqu'ils arrivèrent dans une plaine bourbeuse, la nuit tombait, et les ombres s'allongeaient à l'infini, contrastant les ténèbres qui envahissaient peu à peu l'horizon morne et plat.

Mais les garçons n'eurent pas le temps de respirer, car leur souffle fut happé par la vue, fantastique dans un tel lieu, d'une poignée de prêtre d'Ilhan Waelin montés et accompagnés de dizaines de cavaliers comme de garçons. L'un des soldats à cheval fit un geste impérieux vers les deux rescapés, leur ordonnant de rejoindre le reste du troupeau de garçons. Une fois Desän et son compagnon sans nom accueilli par leurs Frères, le prêtre principal s'élança au trot, et la troupe s'ébranla à l'opposé du soleil, qui se couchait, explosant de rouges plus incendiaire les que les autres.

Le nouveau compagnon de Desän glissa à l'oreille un murmure.

"Je m'appelle Iddan."


Dernière édition par Waelin Vlos le Lun 16 Juin - 0:59, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Ustvholk   Ustvholk EmptyLun 16 Juin - 0:58

ROTHR, Elendar, Har'luth.
Obéir, subir, vaincre. Les préceptes d'Ilhan Waelin prenaient tout leur sens en cette nuit harassante.

Des groupes s'étaient formés autour des prêtres, des S'argt, les Surveillants, et les enfants partirent bientôt vers d'autres villages. La cryptie continuait pour les Forts, et les faibles étaient laissés sur le bas côté. Cette nuit de cryptie a été fêté par les garçons d'Ilhan Waelin comme une nuit sanglante. Les villageois des terres Vlos parlent de cette frénésie meurtrière comme d'une nuit de loups garous.

Les enfants d'Ilhan Waelin, exhortés par les prêtres, s'étaient mis à tuer sans pitié une personne au moins. Des esclaves parfois connus par les garçons tombaient à leur pied, égorgés voire étripés. Les couards étaient vivement rejetés, et les plus impitoyables se voyaient féliciter par les S'argt.
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