Un vieux Gaedien ouvre la porte...

Tout à coup, un vieil homme aux cheveux d'ivoire et aux vetements, probablement blancs à l'origine, mais affreusement salis par les intempéries, fit son apparition. Il grommela :
- Guerres, meutres, trahisons, empoisonnements, médisances, pillages, que ce monde est décidément lourd...


Il se racla la gorge et, semblant parler à lui même :
- Le seul espoir pour l'avenir est un changement de la conscience humaine, et ce changement est inévitable. Mais ce sont les hommes qui décideront s'ils collaboreront ou si ce changement leur sera imposé par la puissance de circonstances écrasantes.

Trois soldats devant leur bière le regardaient maintenant, l'oeil goguenard. Le plus costaud allait lui répondre quelque chose de désobligeant mais le vieillard lui coupit la parole :
- On baigne dans toutes les choses possibles dit-il d'une voix rauque -bon, mauvais, neutre, lumineux, obscur-, tout ça c'est là et la conscience de chacun, en principe, doit agir comme un filtre. On ne doit recevoir que ce que l'on veut recevoir, on ne doit penser que ce que l'on veut penser; et alors on ne doit pas permettre que ces pensées se changent en sentiments et en actions sans une autorisation formelle.

Le gros soldat n'avait rien compris. Il se leva et se dirigea, menaçant, vers le Gaedien, disposé à le jeter dehors pour finir de boire sa bière tranquille.

Le Gaedien jeta un regard implorant vers les autres gens. D'une voix faible, il appela à l'aide :
- N'y a t'il donc ici que des brutes insensibles à la sagesse des arcanes gaediennes ?


Il ne vit personne voler à son secours. Etait-ce sa vue déficiante, ou la triste réalité des choses ?

La porte de l'auberge grinça, un homme en arriva.Ce dernier jeta embrassa la salle du regard, il vit le vieillard et les soudards.A ce moment il cria un grand
"Hey!"plus surpris qu'appeuré
"Que lui voulez vous, soldats ?"

Il entra plus dans la salle chichement éclairé et s'approcha un peu plus du mystique Gaedien.

Le vieil homme, tremblant, jeta un regard inquiet au nouveau venu, et répondit :
- Hélas ! Sentant la fin de ma vie proche, j'ai quitté ma retraite pour tater la réceptivité de la populace à un peu de gaedisation. Malheureusement pour moi, ma curiosité semble me valoir un mauvais quart d'heure...

Le jeune fit un geste, un signe faisaint reculer le vieux prêtre, puis se dirigea lentement vers le soudard levé. Faisant grincer le parquet et mettant en valeur son épée, Avelange exhorta le soudard.
"Et bien, soldat ! En voudrais-tu à un homme de foi, serais un suppôt de Meloï, père des impurs ?"déclara-t-il.
"Tu ose te servir de ta force contre un saint messager du saint père ?Allons assieds toi, et, j'en suis sur, le brave homme pardonnera tes pensées, n'est ce p..."
Avant même d'avoir finit sa phrase et s'être vers son protégé, Avelange se prit un coup de poing de la part de la brute.Avant de tomber, il aggripa l'agresseur et l'entraina avec lui dans sa chute.
Des hommes, dans l'ombre d'une colonne de bois, se levèrent brusquement et foncèrent sur la brute et ses comparses. Les deux groupes se jetèrent littéralement dessus, criant force insultes et cris de guerres.D'autres suivirent la vague de violence, tombant les premiers face contre terre, trop ivres pour tenir la mélée.
Tandis que certains commençaient faiblirent, les plus coriaces prirent les chaises à parti, faisant de grand gestes menaçants avec, et les plus fourbes sortirent des poignards.
Le jeune Avelange, levé mais caché derrière une table brisée, chercha le vieillard dans ce cafarnaum.
Il le vit debout au milieu, criant vainement au milieu du fracas causé par la bagare, attéré par la violence dont faisant preuve ces hommes.Avelange l'attrapa par la manche de sa bure et le tira au dehors de l'auberge.

Le mystique Gaedien, désemparé, suivit docilement le jeune seigneur venu à son secours, mais se ravisa soudainement :

Voilà où a mené ma tentative gaedienne... L'exact opposé de mes convictions... Seigneur, je vous suis profondément reconnaissant, votre action m'a fait apercevoir un peu de lumière dans cette obscurité, mais... il se dégagea soudain et courut vers le batiment. Arrivé à la mêlée, il cria :
- Retrahaniens ! Vos natures et vos substances ne font qu'une avec celles de vos semblables ! Réveillez-vous ! Vivez pour Gaed en vous même et dans les autres !

Un flottement s'ensuivit. Mais la bataille reprit de plus belle, au grand désarroi du vieux mystique ! Les deux camps se valaient en nombre, mais les partisans du Gaedien n'étaient pas les plus agressifs, et commençaient à refluer, certains s'écroulant même sur le sol, assommés par la violence déchaînée de ceux d'en face. Lapidons ce vieillard ! s'exclama une grande brute. De telles paroles, c'est de l'interdiction de se cogner dessus !

Soudain, on entendit une cavalcade, et Avelange reparut suivi d'une cavalière l'écu au bras d'azur semé de fleurs de lys d'or au bâton de gueules brochant sur le tout, à la licorne saillante d'argent, la tête contournée, surbrochant. Elle dégaina son épée et parla en ces termes :
- Hé bien ! D'autres seigneurs vont probablement être attirés par ces fracas de bataille ! Suivant le camp qu'il choisiront, seront défaits l'un ou l'autre camp, et je dois avouer que je suis bien curieuse de savoir lequel. Les Seigneurs-Chevaliers servants de Gaed, ou les Seigneurs-Guerriers hérétiques ?

Puis elle se jeta dans la mélée.