An de grâce 224, troisième jour de Lugh de ce mois-ci.
Je tiens à inscrire dans le journal de bord la découverte d'une nouvelle créature de Gaed à Ashérat, ville de l'Archipel. Alors que nous venions pour acheter cinq centaines de poteries de la ville portuaire et pour traffiquer six tonneaux d'aciers Cirannais, nous découvrîmes un animal fort étrange, qui excita la curiosité de mon équipage. Nous étions en train de parcourir les eaux piquées de monts nus de la cité d'Ashérat, lorsque nous aperçûmes un corps délaissé là, sans sépulture ni sacrement. Sur ce mort, il y avait - ou plutôt paraissait-il y avoir - trois petits chiens à tête retroussée, qui se nourrissaient du cadavre.
Nous comprîmes bien vite notre erreur en les pensant chiens, parce qu'ils étaient fort différents. Leur fourrure, que jamais chien ne porte, est d'une couleur jaune fauve, tirant parfois sur celle du cigne et parfois sur celle de la châtaigne. Leurs oreilles, qui ne sont pas ballantes comme beaucoup de chiens, sont fines et forme un triangle. Leur yeux sont bien grands et bien ronds, et sont teintés de bleu comme de gris, tout dépend des créatures. Les plus grandes que nous avons découvertes font deux pieds de taille, et les plus petits atteignent une moitié de pied. Je laisserai à messieurs les docteurs de Beila, qui ont bien plus la compétence que moi à la physionomie, de décrire le faciès de ces dernières.
Mais nous ne pûmes tout à l'heure découvrir ces caractères du corps, car il nous fallut d'abord capturer ces animaux, qui se montrent aussi craintifs et agressifs que les autres animaux des fôrets, chose qui se solda par un échec. Après cette brève rencontre et la fuite précipitée des créatures, nous apprîmes des Asheratois que ces bêtes-là sont des bêtes bien connues en Ashérat, et que leurs femmes, dans leur sérail, aiment en avoir aux entours. Ils nomment ces bêtes Tisrys, mais ce nom qui est trop barbare pour la belle langue empersoise ne peut conveni. Donc, j'ai décidé d'appeler ces Tisrys des Limériens, en l'honneur de ma ville de baptême qu'est Limeray.
Alain Degardie, capitaine de la Doulcia.
An de grâce 226, premier jour d'Ogen de ce mois-ci.
Depuis la fuite de trois spécimens en dehors des salles de Beila, il y a deux ans à peu près, la population limérienne s'est propagée rapidement et un peu partout en Beilan. C'est la conséquence de la vente de ces bêtes, que les femmes de mode s'arrachent. Tout le monde compte avoir son Limérien chez soi. Certains bourgeois même se débarrassent de leurs chiens pour que l'animal ne s'enfuisse pas. Bientôt, je le crains, le Limérien s'en ira même plus loin, sûrement en Ciran et en Gramée...
F. Tiermons, abbé de Ninton.
HRP : Désolé.
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